Il faut passer au «too central to fail»

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Banques «Too big to fail»Il faut passer au «too central to fail»

Des scientifiques suisses et italiens pensent qu'il faut changer d'approche pour déterminer si les difficultés des banques constituent une menace pour l'entier du système financier.

Au terme de leur analyse des interventions de la banque centrale américaine, les scientifiques ont constaté que c'est moins la grosseur des banques qui est déterminante que leur implication dans un réseau avec les autres établissements financiers. Conclusion: le «too big to fail» doit laisser la priorité à un «too central to fail».

Les chercheurs de l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) ont d'abord constaté que c'est un groupe de 22 banques qui a constitué le noyau central de la crise financière entre 2008 et 2010. A travers des crédits, des participations croisées et une dépendance financière, elles étaient si étroitement imbriquées que les difficultés de paiement d'une seule d'entre elles menaçait l'entier du système financier. C'est ce qui ressort d'une étude publiée vendredi dans la revue en ligne «Scientific Reports» par une équipe du «D-MTEC» Stefano Battiston, Michelangelo Pulig, Pahul Kaushik et Paolo Tasca, qui ont collaboré avec Guido Caldarelli de l'institut de recherche IMT à Lucca en Italie.

Indicateur parmi d'autres

En novembre 2008, le crédit de sauvetage de la Réserve fédérale américaine (FED) se montait à 804 milliards de dollars afin d'empêcher que tout le système financier US ne s'effondre. Or, la position des 22 banques concernées était au coeur du réseau des instituts financiers nord-américains et c'est ce qui leur donnait ce caractère vital pour l'ensemble de l'économie.

La grosseur d'une banque n'est donc qu'un indicateur parmi d'autres. Les risques systémiques peuvent également provenir de petites banques qui sont tellement imbriquées dans un réseau avec d'autres établissements financiers que leur faillite entraînerait une réaction en chaîne.

Les scientifiques ont pu avoir accès aux données du programme d'urgence mis en place par la FED grâce à un jugement de la Cour suprême des Etats-Unis. Cette dernière avait donné gain de cause à l'agence de presse Bloomberg, qui voulait voir ces données, car le système financier américain avait assaini grâce à des fonds publics. Ces données contiennent les dettes résiduelles et la capitalisation sur les marchés de 407 instituts financiers. Ce qui constitue des indices sur le degré d'endettement des banques et d'éventuelles difficultés de paiement.

22 banques analysées

Au plus fort de la crise, une trentaine de banques ont atteint en même temps le point culminant de leurs difficultés. Si on considère toute la durée du programme d'urgence de la FED, on ne trouve qu'une vingtaine des plus importants établissements preneurs de crédits qui y ont eu recours régulièrement.

Les chercheurs zurichois ont donc concentré leur analyse sur un noyau de 22 instituts qui, durant l'ensemble de cette période, ont obtenu en moyenne plus de 5 milliards de dollars de crédits d'urgence. Parmi eux figurent l'UBS et le Credit Suisse qui ont eu, entre 2008 et 2010, un endettement auprès de la FED de 13,89 et de 13,29 milliards, respectivement. Elles se trouvaient alors aux 6e et 7e rangs du classement des banques les plus endettées.

Afin de déterminer le degré de dépendance d'une banque par rapport aux autres, les scientifiques ont notamment utilisé une méthode comparable à celle du moteur de recherche Google. Cette procédure se base sur le nombre de liens auxquels renvoie une page internet donnée. (ap)

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