«Je n'ai aucune honte à parler de mon passé»

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Céline Tran«Je n'ai aucune honte à parler de mon passé»

Céline Tran, ex-star du X connue sous le nom de Katsuni, multiplie ses activités artistiques depuis qu'elle a arrêté le porno, en 2013. Et rien ne semble la stopper...

Ludovic Jaccard
par
Ludovic Jaccard

Après avoir tourné près de 400 films X en treize ans, l'ex-hardeuse Katsuni ne regrette pas sa sulfureuse carrière. Aujourd'hui, la Française de 37 ans s'est reconvertie dans diverses activités professionnelles, sous son véritable patronyme: Céline Tran. Elle se confie à «20 minutes».

Pouvez-vous nous parler de vos différentes activités, ainsi que vos projets depuis l'arrêt de votre carrière dans le X, en 2013?

J'ai marqué le début de ma nouvelle carrière d'actrice en jouant dans la websérie «Le Visiteur du Futur», en 2013, qui depuis a été diffusée sur France 4. C'est ma première apparition en tant que comédienne sous mon vrai nom , Céline Tran. J'y joue La Baronne, personnage le plus pudique de la série! J'ai aussi tourné plusieurs vidéos: le teaser de la BD «Heartbreaker», mais aussi «Bladed Minds», «Burst» et «Dust Machina» qui sont des démos où je montre mes capacités en tant que comédienne d'action. Mon premier long-métrage d'action, «Jailbreak», sort d'ailleurs en salles dans quelques jours au Cambodge et sur le marché asiatique. J'y joue l'un des personnages principaux, la cheffe de gang. En tant que comédienne, je souhaite aussi explorer les planches, je prépare donc un spectacle de stand-up.

Vous avez aussi sorti une bande dessinée.

Ma première BD a été publiée en 2014 «Heartbreaker/Doggybags», en collaboration avec Run (Ankama / Label 619). La suite que j'ai aussi co-écrite sort dans quelques mois, et j'ai l'intention de poursuivre l'écriture dans le domaine de la BD.

Et quoi d'autres?

Je suis aussi consultante et rédactrice de contenus pour la nouvelle chaîne Youtube «Ça zap! Sexy Séduction» destinée à donner des conseils sur la sexualité, le couple, la drague… D'autres chaînes sont en préparation dont ma chaîne perso qui sera axée en revanche sur le sport. Et depuis quelques mois, j'ai commencé à mixer et eu la chance de bosser avec l'Aeronef, la Villa Schweppes, le VIP Room Paris. Je fais désormais partie de l'agence Tête D'Affiche (Greg Boust). Une tournée est prévue en 2018, j'ai hâte! Enfin, afin de parler de tout ce que j'aime (car beaucoup de choses m'intéressent à titre professionnel et personnel), je viens de lancer mon blog qui parle cinéma, BD , voyages, sexualité, sport… Je propose aussi de répondre au courrier des lecteurs pour des conseils en matière de sexualité sur le site maviedeninja.com. En événements marquant depuis mon retour: en 2013 aux côtés de Bernard Pivot, j'ai eu le plaisir d'avoir été marraine du Festival Livres en Tête. En 2015, j'ai participé à la mise en place de l'exposition «Zones Imaginaires» avec l'artiste plasticienne Iglika Christova sur la question du rapport au corps. Cela a été l'occasion pour moi de réaliser une performance de contorsion.

Laquelle de ces expériences vous plaît-elle le plus et pourquoi?

Elles me plaisent absolument toutes! C'est ça que j'aime: pouvoir m'exprimer à différents niveaux dans des registres différents. Je ne me donne pas de limites, tout est connecté. C'est le tout qui est enrichissant, une activité stimule et inspire l'autre.

Vous êtes récemment montée sur scène en tant qu'humoriste de stand-up. Pour quelles raisons vous êtes-vous lancée ce défi et comment cela s'est-il passé avec le public? Avez-vous eu le trac?

Oh que oui! J'avais un peu l'impression de passer au tableau noir, mais ça m'a prodigué une dose savoureuse d'adrénaline. C'était vraiment ma première expérience de scène en tant que comédienne et avec un monologue que j'avais écrit sur le thème des messages des fans, révélateurs du «malentendu» entre le public et le fantasme plus ou moins caricatural qui se construit autour de l'actrice porno, même quand celle-ci a arrêté sa carrière. J'ai tellement aimé l'expérience que je travaille aujourd'hui sur l'écriture d'un spectacle complet. Le public a été adorable. C'était à Nouvelle Seine, au spectacle Première Fois, tout le monde était bienveillant. Je n'étais clairement pas préparée à jouer en live mais justement, ça m'a permis d'évoluer et de me poser les bonnes questions.

Avez-vous envie de continuer dans cette voie?

Oui tant que ça a du sens pour moi, que ça m'amuse, que l'envie est là, que des personnes fiables m'encouragent et me conseillent, pas question de renoncer.

Vous apparaissez dans plusieurs vidéos humoristiques sur Youtube dans lesquelles vous semblez très à l'aise. D'où vous vient ce potentiel comique?

On a tous un potentiel comique! Tout comme on a tous un potentiel de séduction, de «guerrier», etc… Seulement c'est à chacun de l'explorer. Pendant des années, j'ai développé un personnage et une image basée sur la séduction et la sexualité. Il est temps de montrer autre chose. Et puis c'est merveilleux de pouvoir faire rire les gens, enfants y compris!

Malgré banalisation du porno, il paraît encore difficile pour une ex-actrice X de démarrer une nouvelle carrière. Qu'en pensez-vous?

Je pense que le danger est de généraliser. Que le discours soit positif ou négatif. Chaque expérience, chaque personne est différente. Je connais des femmes qui ont été actrices X et qui se sont lancées dans de nouvelles carrières professionnelles avec succès, ont fondé une famille. Elles s'adaptent, elles travaillent. Pour d'autres, il arrive que leur passé les freine. Une forme de discrimination peut se faire ressentir c'est vrai, comme si avoir fait du porno était un crime. Mais attention à ne pas tomber dans la victimisation et de percevoir chaque obstacle ou refus comme une forme de discrimination. Le marché du travail est précaire pour la plupart des gens donc rien n'est simple ou juste…

Cela vous dérange-t-il que certains médias vous rappellent votre ancienne carrière dans les interviews?

Je n'ai pas de problème avec quelque chose que j'ai aimé, qui m'a autant apporté, je n'ai aucune honte à mentionner mon passé. Certains n'apprécient pas cette franchise et parfois ça me ferme des portes. Tant pis pour eux. Ce qui m'importe est d'avancer, de me concentrer sur le présent et de toutes les bonnes choses à venir.

Est-ce la raison pour laquelle vous voulez que l'on vous appelle désormais Céline Tran, contrairement à Clara Morgane qui a gardé son pseudo pour ses nouvelles activités?

Je ne connais pas ses motivations, chacune a ses envies et objectifs. Pour ma part, le sexy ne m'intéresse pas. C'était l'expérience de la sexualité à travers la pornographie qui m'intéressait et cela me plaisait de porter un nom de «guerrière», cela participait au «déguisement». Aujourd'hui je m'exprime de différentes manières, il est naturel que je reprenne mon vrai nom.

Votre ancienne carrière est-elle plutôt un atout ou un frein pour vos nouveaux projets?

Les deux, mais je ne m'y attarde pas. Il arrive qu'un producteur ou directeur de casting me dise: «Désolé, ils voulaient bosser avec toi, tu as passé les auditions, mais quand ils t'ont reconnue, ils ont flippé et annulé». D'autres au contraire se montreront curieux et plus enclins à me rencontrer, mais au final c'est le feeling et l'envie de construire un projet ensemble qui compte, qu'on soit sur la même longueur d'onde. Ça ne m'intéresse pas de bosser «à moitié» ou juste pour le buzz. Même si le succès dans notre société n'est pas proportionnel au mérite, je crois vraiment que le travail et la persévérance paient.

Au regard d'une certaine stigmatisation, regrettez-vous votre passage dans le X ou l'assumez-vous à 100% ?

La stigmatisation? Je m'en fous. Je n'ai pas fait le choix du X pour faire plaisir aux autres et je n'ai pas non plus arrêté pour les autres. Je suis mon instinct, on ne peut jamais se tromper quand on écoute ce qui nous épanouit vraiment et qu'on est dans une dynamique de partage.

Vous venez de tourner dans votre premier long-métrage, un film d'action cambodgien, «Jailbreak», où vous avez un rôle très physique. Comment s'est passé le tournage?

Oui, c'est un film qui comporte beaucoup de scènes de combat. J'ai justement obtenu le rôle entre autres parce que j'avais de bonnes bases en combat scénique et il n'était pas question d'être doublée. Le tournage a été assez éprouvant étant donné la chaleur et le fait que je me fasse une entorse à quelques jours de mes combats! Donc expérience éprouvante mais enrichissante, surtout dans la rencontre d'une culture que je ne connaissais pas. J'ai d'ailleurs une partie de mes dialogues en khmer.

Pourquoi avoir accepté ce rôle?

Il y a eu un échange équitable et franc entre les producteurs et moi. Ils m'ont écrit le rôle sur mesure et je me suis engagée à donner le meilleur de moi-même.

Avez-vous envie de continuer dans le cinéma?

Oui, bien sûr. J'ai d'autres propositions de films aux US, en France et en Asie mais contrairement au monde du X, tout prend beaucoup plus de temps! Il y a beaucoup de paramètres à respecter pour qu'un film aboutisse vraiment, donc je n'annonce rien tant que le film n'est pas prêt à être diffusé.

Quels genres de rôles pourraient vous intéresser?

En tant que fan de films d'horreur et d'action, j'ai évidemment envie de tenir des rôles de guerrière, des rôles physiques et extrêmes, où je prends vraiment des risques mais le jeu m'intéresse dans toute sa dimension et hors de question de m'enfermer dans une case. Je ferai mes choix comme d'habitude en fonction de mon instinct et des défis à relever!

Regardez la bande-annonce du film «Jailbreak», avec Céline Tran:

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