GenèveSalle de prière pour tous à l'Uni, même les athées
Une pétition demande un lieu «de méditation» à Uni Mail. Ses auteurs le rêvent multiconfessionnel. Le syndicat estudiantin appuie la démarche.

«Il ne s'agit pas de créer un lieu de culte déguisé pour y faire du prosélytisme», jure Yousuf Qurashi. Ce Genevois en 2e année d'économie et management, musulman pratiquant, a lancé il y a une semaine une pétition en ligne qui compte aujourd'hui plus de mille signatures. Elle demande l'ouverture d'une salle de méditation à Uni Mail, pour permettre aux étudiants «quelle que soit leur confession et croyance, de se ressourcer et de profiter d'un lieu apaisant sur le plan spirituel». Une lettre et les paraphes devraient être envoyés au rectorat dès lundi prochain.
Personne ne doit être exclu
Pour Yousuf, la salle doit servir à la prière, mais pas seulement. «La religion n'est pas la priorité d'un tel lieu dans une ville multiculturelle et multiconfessionnelle. Tout le monde sera bienvenu, personne ne doit être exclu et surtout pas les athées.» Le projet imagine en effet un espace de partage et de repos. Le jeune homme prévient: «Il devrait être interdit d'y faire du prosélytisme».
Reconnu pour son attachement au dialogue interreligieux et son ouverture d'esprit, l'ancien porte-parole de la mosquée de Genève Hafid Ouardiri a signé la pétition. «Je suis convaincu qu'un tel lieu peut promouvoir le vivre ensemble», s'enthousiasme l'actuel directeur de la Fondation de l'Entre-connaissance.
Pénurie de locaux
Le projet bénéficie aussi du soutien de la Conférence universitaire des associations d'étudiants (CUAE). «Il y a une vraie demande de salle pour se ressourcer spirituellement mais aussi pour souffler, loin du stress de l'uni, affirme son secrétaire permanent, Leonhard Unterlerchner. Un tel espace peut également créer des liens entre universitaires.» Le syndicat estudiantin a déjà interpellé le rectorat à plusieurs reprises à ce sujet, en vain.
La pétition en ligne ne paraît pas convaincre l'alma mater. Celle-ci attend une demande formelle, qu'elle «traitera ensuite comme les autres». Mais elle ajoute qu'en raison de la hausse continue du nombre d'étudiants, l'actuelle «pénurie de locaux (...) particulièrement à Uni Mail (...) ne permet pas de répondre à tous les souhaits». L'Université note aussi qu'étant située au centre-ville, des espaces de méditation sont accessibles hors de ses murs.
Alors qu'en 2013, l'ouverture d'une salle de prière à la Haute école du paysage et d'ingénierie avait suscité la polémique, le Département de l'instruction publique rappelle de son côté que la loi sur l'Université garanti l'autonomie de l'institution. «Il lui revient de répondre aux demandes de la communauté universitaire en termes de locaux et de leur utilisation.»
On prie et on médite à Lausanne
Depuis 2006 déjà, l'Université de Lausanne possède une salle sur le modèle de celui demandé par la pétition genevoise. Ouverte à tous, elle est dévolue à la méditation et au recueillement, "religieux ou pas", précise la porte-parole de l'UNIL. Francine Zambano relève qu'il "n'y a jamais eu de problème". Celles et ceux qui s'y rendent doivent être détenteur d'une carte universitaire et s'inscrire au préalable. Objectif: éviter la venue de visiteurs extérieurs à l'alma mater vaudoise. A l'heure actuelle, une centaine de personnes fréquentent régulièrement l'endroit.
L'EPFL abrite également pareil lieu depuis "de nombreuses années". La salle
est gérée par les aumôniers actifs au sein de l'institution. "Ils favorisent la rencontre et le dialogue dans le respect des convictions des uns et des autres, sans distinction de religion" précise Daniel Chuard, porte-parole de l'école polytechnique.