GenèvePrison ferme pour avoir travaillé sans permis
Sans statut légal en Suisse, deux Brésiliens sont condamnés sans avoir commis d'autre délit que leur séjour.
Les nounous, femmes de ménage et ouvriers clandestins doivent-ils trembler? Les syndicats, qui évaluent leur nombre à 8000 au bout du lac, le craignent. Ivone, coiffeuse, et Luciano, manuel, contrôlés en décembre sur la route, ont écopé de deux mois de prison ferme pour séjour illégal. Ils sont jugés récidivistes: voici deux ans, ils avaient été punis de jours-amende.
Outré, le syndicat Unia a lancé mercredi une pétition demandant l'annulation de la sanction. Dans son viseur, la «directive Jornot»: depuis l'automne, le procureur général manie la loi sur les étrangers pour enfermer les délinquants multirécidivistes ou inexpulsables. Mais le magistrat a toujours affirmé que l'outil ne viserait pas les clandestins «honnêtes».
Or, après huit ans en Suisse, Ivone et Luciano n'ont jamais fauté. «Ce qu'Olivier Jornot dit est une chose, la pratique en est une autre», tance donc Silas Teixeira, d'Unia. L'avocat du couple, Me Gabbai, tempête. «Rien ne justifie une telle sanction! Depuis 2007, les procureurs ne peuvent prononcer de courtes peines privatives de liberté qu'à titre exceptionnel. Une amende aurait été bien plus adéquate.»
De fait, selon le syndicat SIT, ce cas de prison ferme est unique à Genève. Le procureur général, lui, se déclare étranger au cas «qui n'est pas couvert par sa directive», dit le Parquet.
La peine relèverait du libre arbitre du magistrat saisi de l'affaire, «en vertu de l'indépendance dont chacun bénéficie». Le jugement, contesté, sera soumis au Tribunal de police.