Les époux Roms peuvent sortir de prison

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GenèveLes époux Roms peuvent sortir de prison

Deux Roumains avaient été jugés mercredi pour avoir exploité des compatriotes. Ils ont été acquittés sur ce point jeudi, faute de preuves. Par contre, ils écopent d'une peine avec sursis pour infraction à la loi sur les étrangers.

Marine Guillain/ats
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Marine Guillain/ats

L'enquête du Ministère public n'a pas permis d'établir qu'un couple de Roumains à la tête d'une entreprise de transport avait exploité ses clients durant un an. Les époux ont été acquittés de traite aggravée d'êtres humains, ce jeudi. Le juge a ordonné leur libération.

Adrian* a monté sa société en 2011. L'homme de 44 ans se chargeait de transporter des Roms de son village à Genève, pour qu'ils puissent y travailler. Coût du trajet de 2000 km en fourgon: environ 130 francs. La majorité des voyageurs ne pouvaient pas payer. Le Roumain leur faisait crédit et leur laissait quinze jours pour le rembourser. En août 2012, sept personnes ont porté plainte contre Adrian et sa femme: ceux-ci les auraient menacés, forcés à mendier ou à se prostituer, et leur demandaient toujours plus d'argent. Les époux ont été emprisonnés en août 2013.

«Ils ont profité de la faiblesse des autres, avait martelé la procureure, mercredi. Ce sont des parasites, ils ont transporté des êtres humains comme de la marchandise». Selon elle, le couple a maintenu ses clients dans la dépendance car leur dette était impossible à payer juste en mendiant. Le Tribunal correctionnel a écarté ces accusations, jeudi: «Les écoutes téléphoniques établissent que les personnes transportées pouvaient retourner en Roumanie même s'ils n'avaient pas payé leur voyage, et qu'elles pouvaient faire ce qu'elles voulaient de l'argent qu'elles gagnaient à Genève». Le juge a ajouté que les plaintes déposées étaient contradictoires et que les prévenus n'avaient jamais pu être confrontés aux plaignants, évanouis dans la nature. De plus, les plaignants et leurs interprètes avaient caché à la police leurs liens familiaux. Selon la défense des deux accusés, les déclarations des «plaignants fantômes» étaient dues à une «guerre des clans» entre deux familles, concurrentes sur le marché des transports.

Au final, le seul fait reproché au couple est d'avoir facilité les entrées illégales d'environ 60 à 80 personnes sur le territoire suisse durant un an. Les époux le faisaient en étant tout à fait conscients que leurs clients allaient commettre des infractions pour se faire de l'argent. L'homme a été condamné à quatorze mois de prison et de 90 jours-amendes à 10 francs. Son épouse et associée a écopé de 12 mois de prison et 60 jours-amendes à 10 francs. Tous deux bénéficient du sursis, assorti d'un délai d'épreuve de trois ans. Leur véhicule est gardé pour payer les frais de procédure de 17'136 francs. Ayant déjà passé 14 mois à Champ-Dollon, les prévenus ont donc pu sortir de prison ce jeudi.

«Le Tribunal a démantelé un réseau, s'est réjoui la procureure à la sortie de l'audience. Nous espérons que ce jugement donnera un signal aux autres bandes d'exploiteurs». Elle a reconnu que les soupçons de harcèlement et de menaces avaient été trop difficiles à prouver. Ravi que son client soit libre, Me Bauer a tout de même regretté que le couple n'ait pas été indemnisé, «alors qu'ils n'auraient pas dû passer ces 14 mois en prison».

*prénom d'emprunt

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