GenèveLe patron désire engager, mais que des frontaliers
Une offre d'emploi fait scandale. Le restaurateur s'explique. Un flou entoure cette affaire.

Musa avec la lettre de l'Office cantonal de l'emploi (OCE), datée du 17 novembre, attestant qu'il y a enregistré son emploi vacant.
photo: Kein Anbieter/jef / 20 minutesLes réseaux sociaux ont crépité tout jeudi. Musa, à l'origine de la tempête, dit avoir reçu des menaces. La page facebook de son restaurant est couverte de commentaires outrés et d'appels au boycott. En cause, une annonce en ligne. «Cherche serveuse à 100%, uniquement frontalière.»
«Honteux», «scandaleux», «dégueulasse». Les internautes se sont déchaînés. Vendredi, Musa assumait. «C'était un ras-le-bol. Bien sûr que si une locale veut travailler, je la prends. Mais elles ne veulent pas. Depuis que j'ai contacté l'office cantonal de l'emploi en novembre, j'ai vu une vingtaine de filles. Aucune n'a pris le boulot.» Selon lui, les candidates ne cherchaient qu'un job d'appoint, refusaient de travailler le soir ou n'étaient disponibles que quelques mois. «J'en ai eu marre. Et les frontalières, on les prie de revenir le dimanche pour un banquet, elles sont là avec le sourire.»
Qu'ils croient ou pas ces arguments, le procédé heurte deux députés. «Tolérer cela est absolument exclu. C'est moralement inacceptable, réagit Romain de Sainte Marie (PS). Ça l'est autant que de réserver un emploi à un Suisse ou à un Genevois.» Carlos Medeiros (MCG), lui, «peut comprendre la démarche car dans certains secteurs, il y a un problème, c'est une réalité. Mais c'est très maladroit, l'annonce est inacceptable. C'est de la discrimination. On n'est plus chez nous ou quoi?» L'offre ne viole en revanche pas la loi, juge Me Bernard Nuzzo. «Elle ne contient aucune discrimination raciale ou religieuse.»
Salaire mis en doute
Musa jure offrir 4200 fr. brut, avec un 13e salaire, le week-end congé et six semaines de vacances. D'après des témoignages vus sur la toile, la paie tournerait plutôt autour de 3000 fr. net. Divers à-côtés, dont des essais non rémunérés, freineraient les postulantes. En outre, selon nos informations, le patron ciblerait des filles sans CFC. Dans ce cas, la convention collective prévoit 3400 fr. brut. «S'il offrait ce qu'il dit, les gens se précipiteraient», évalue l'élu Romain de Sainte Marie.
Jours de pénalité
L'Office cantonal de l'emploi (OCE)n'évoque jamais les cas particuliers. Son porte-parole indique qu'il «cherche à trouver une adéquation entre employé et employeur». Il vérifie que le demandeur envoyé est reçu. «Le patron doit dire s'il est venu et pourquoi, le cas échéant, il n'a pas été pris.» Le chômeur peut être sanctionné par des jours de pénalité s'il fait défaut ou refuse un job sans juste motif. L'OCE essaie aussi de s'assurer que les exigences du patron ne sont pas farfelues.