GenèveLe curé aimait trop le jeune servant de messe
Le tribunal juge un vieux prêtre genevois. Il avait abusé d'un ado qui voulait devenir religieux.

Le prêtre de 75 ans officiait dans une paroisse genevoise.
photo: AFP«Durant 50 ans, l'église a choisi de cacher. Le Ministère public ne souhaite pas aller dans cette direction.» Le premier procureur Stéphane Grodecki veut que soit jugé en plein jour le prêtre de 75 ans qui a caressé et prodigué une fellation a un servant de messe de 17 ans. Jeudi, la présidente du tribunal l'a suivi, rejetant le huis clos plaidé par la défense.
«Je lutte tous les jours pour fermer cette cicatrice, témoigne Luc*. Je suis fâché, on m'a enlevé ce que j'aimais, ma passion pour l'église.» «Tout ce sur quoi il avait bâti sa vie a été balayé», tance son conseil Me Bertani. A l'été 2015, le curé a emmené manger ce jeune se rêvant prêtre, avec qui il devisait liturgie le dimanche. Il l'a invité chez lui voir des photos du pape. Il l'a étreint, pris dans sa bouche, jusqu'à ce que Luc, tétanisé, articule «ce n'est pas dans les évangiles». «Ça m'a réveillé», relate le religieux.
Ni viol, ni contrainte. Le Parquet l'accuse d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes. Cette dépendance se matérialiserait par l'écart d'âge, la révérence absolue que vouait Luc aux hommes d'église et sa relation de confiance avec l'abuseur. Deux ans de prison avec sursis sont réclamés. Me Yersin plaide l'acquittement. «Il y a eu une situation qui est grave, pas niée.» Mais nulle soumission. La victime «a vu mon client 25 fois à raison de 20-30 minutes sur un an. Etablit-on un lien de dépendance en huit heures?» Verdict vendredi.
*Prénom d'emprunt
Eglise sermonnée par le procureur
«Le rôle trouble joué par l'église» catholique dans ce dossier a été souligné par le Parquet. Au courant des actes du prêtre, elle ne l'a pas dénoncé. Ironiquement, c'est en voulant le protéger qu'elle l'a fait tomber. Il a dû subir une opération. Sans nouvelles, le clergé a craint qu'il se suicide. Il a alerté la police, qui a trouvé chez lui une lettre d'excuses pour Luc s'achevant par «merci et sans rancune». La justice s'est alors enclenchée. L'évêque a suspendu le curé.