Trop d'argent versé pour la campagne: élus en moins

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GenèveTrop d'argent versé pour la campagne: élus en moins

Ensemble à Gauche veut plafonner les dépenses électorales des partis. Des dépassements entraîneraient la perte de sièges au Grand Conseil.

David Ramseyer
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David Ramseyer

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Achats à la pelle de pleines pages dans les médias, trams et bus décorés à foison. L'actuelle campagne pour les élections cantonales constitue «une surenchère jamais vue et malsaine» des moyens investis par certains partis, selon le député d'Ensemble à Gauche (EàG) Pierre Vanek. «C'est alarmant!» acquiesce sa collègue Jocelyne Haller. Candidate au Conseil d'Etat, elle juge que faire de la politique via un marketing forcené revient à «acheter» sa place au Grand Conseil: «Cela cause une inégalité entre partis, ce n'est pas bon pour la démocratie». La formation d'extrême gauche va ainsi déposer un projet de loi pour limiter les dépenses électorales cantonales.

Limiter les dons

Le texte prévoit qu'un parti qui débourse plus de 50'000 fr. devra inscrire son budget auprès de la Chancellerie au moins un mois avant le scrutin. Celui-ci sera rendu public. Le plafonnement est fixé à 2 fr. par électeur inscrit. «Aujourd'hui, cela représenterait un montant maximum de 523'000 fr.», précise Pierre Vanek, dont la formation chiffre à plus de 250'000 ses propres frais pour le scrutin de ce printemps. Les dons de personnes morales ou physiques domiciliées hors du canton seraient interdits, sauf pour celles travaillant à Genève ou pour les Suisses de l'étranger.

Tout dépassement, avec une tolérance de 10%, serait sanctionné par la perte de sièges. En clair, 30% de dépensé en trop équivaudrait à 30% de députés en moins.

L'argent pour s'offrir un parti?

L'idée de plafonner les frais de campagne n'est pas nouvelle à Ensemble à Gauche. Mais le parti ne cache pas que «la débauche de moyens de Genève En Marche et dans une moindre mesure du MCG», l'a interpellé. «La formation d'Eric Stauffer est grandement financée par un milliardaire brésilien sulfureux, dont les affaires ont fait l'objet de plusieurs enquêtes dans son pays», souligne Pablo Cruchon, candidat d'EàG au Grand Conseil. Pour Jocelyne Haller, le projet dévoilé ce jeudi constituerait justement «une entrave aux débordements financiers, pour éviter qu'un commanditaire, un lobby ou des individus avec des intérêts particuliers ne s'offrent des partis».

Un projet jugé antidémocratique

Pris pour cible, Genève En Marche et son président Eric Stauffer estiment que limiter les frais de campagne constituerait "une atteinte aux droits constitutionnels. La liberté de sponsoriser un parti doit être garantie, avance le tribun. En revanche, la transparence doit être la règle." Combien la nouvelle formation a-t-elle dépensé pour ces élections? Eric Stauffer refuse d'avancer un chiffre précis: "Les comptes ne sont pas bouclés mais nous sommes dans le haut du tableau".

De son côté, la présidente du MCG (budget annoncé: 800'000 fr.) dit comprendre la démarche d'Ensemble à Gauche, notamment du point de vue des petits partis. Reste que pour Ana Roch, pas question d'un plafonnement, "les formations politiques ont le libre choix stratégique de dépenser leur argent comme bon leur semble". Enfin, sanctionner les dépassements budgétaires par une perte de sièges de personnes élues par le peuple lui semble aberrant et antidémocratique.

L'argument fait mouche aussi auprès du président du PLR (budget annoncé: plus de 500'000 fr., soit le plus important après (a priori) Genève En Marche ainsi que le MCG). Alexandre de Senarclens ajoute qu'expérience faite, dépenser beaucoup ne garantit pas une victoire: "L'électeur décide en son âme et conscience, il sait ce qu'il fait, quel que soit le montant investi dans une campagne".

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