Tours censure Dieudonné, Nyon y songe

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France/SuisseTours censure Dieudonné, Nyon y songe

Le tribunal administratif d'Orléans a confirmé vendredi l'interdiction du spectacle de l'humoriste à Tours. Nyon songe à faire de même pour les représentations de février et mars.

La justice française a confirmé vendredi l'interdiction d'une représentation de Dieudonné prévue en soirée à Tours.

L'humoriste controversé, déjà condamné plusieurs fois pour antisémitisme, pourrait voir son spectacle annulé samedi à Orléans.

Dieudonné M'bala M'bala a perdu une nouvelle manche juridique. Le Conseil d'Etat français a confirmé l'interdiction de son spectacle «Le Mur» prévu à Tours. La plus haute juridiction administrative avait déjà interdit la représentation prévue la veille à Nantes, qui aurait été la première étape d'une tournée en France.

«Un élément qui m'a frappé durant cette audience, c'est qu'on atteint le ridicule puisqu'on est obligé de juger au Conseil d'Etat, la juridiction la plus prestigieuse de la France, de ce qui est drôle et de ce qui n'est pas drôle», a déclaré à la presse un des défenseurs, Me Sanjay Mirabeau.

Sans surprise, le Conseil d'Etat ne s'est pas déjugé. Les avocats de Dieudonné entendent toutefois revenir à la charge auprès du Conseil d'Etat selon la décision que prendra le tribunal administratif d'Orléans.

Celui-ci doit se prononcer samedi à 11h00 au sujet d'une représentation prévue le soir-même à Orléans car le député-maire UMP Serge Grouard l'a interdite.

Feuilleton judiciaire

Le préfet de police de Paris a par ailleurs engagé une procédure en vue d'interdire le spectacle au théâtre parisien de La Main d'or où une cinquantaine de représentations sont programmées d'ici à juin. L'humoriste et ses producteurs ont quarante-huit heures pour faire valoir leurs arguments.

Ce feuilleton judiciaire conforte pour l'instant le ministre français de l'Intérieur Manuel Valls. Sa stratégie consistant à faire interdire les spectacles,au cas par cas par les préfets ou les maires a été contestée au sein de la classe politique.

«Justice d'exception»

Les décisions du Conseil d'Etat constituent un revirement de jurisprudence, car les tribunaux administratifs ont, à quinzaine de reprises ces dernières années, invalidé des arrêtés d'interdiction de spectacles de Dieudonné. L'artiste a été condamné à de multiples reprises pour antisémitisme.

Elles devraient peser sur l'ensemble des procédures, mais les avocats du polémiste dénoncent une «justice d'exception» et ne désespèrent pas d'obtenir un retournement. Pourtant, selon l'avocat Patrice Spinosi, spécialiste de ce type de dossiers, «le spectacle 'Le Mur', aujourd'hui, n'est plus susceptible d'être programmé».

A Nyon en février

Dieudonné doit se produire à Nyon (VD) en février. La municipalité pourrait interdire le spectacle si celui-ci est interdit sur tout le territoire français.

«Les attentes, - voire les manifestations-, des partisans et des opposants se cristalliseraient sur la ville de Nyon, avec de potentiels troubles de l'ordre public», redoute la commune vaudoise dans un communiqué publié vendredi.

Spectacle modifié?

Me Sanjay Mirabeau a par ailleurs expliqué à Reuters TV que les défenseurs de Dieudonné réfléchissent à une modification du spectacle. «Il s'agit de se conformer à ce que réclament l'ordre public et les libertés fondamentales. Si on estime pour le moment qu'il faut éviter certains sujets, pourquoi pas», a-t-il dit.

«Pourquoi ne pas changer de spectacle, changer le titre, changer le contenu, éviter certains sketches, en ajouter d'autres, et pourquoi pas faire un spectacle sur la communauté noire par exemple ?», a-t-il ajouté.

Silence et mépris

Plusieurs éditorialistes craignent que la victoire judiciaire de Manuel Valls n'ait pour conséquence de transformer l'humoriste en «martyr».

«Cet homme-là ne méritait que silence et mépris. Il jouit désormais d'une notoriété malsaine dont il va user et abuser auprès de partisans hystérisés», écrit Yves Thréard dans le quotidien «Le Figaro».

Dans les colonnes de «Libération», François Sergent estime que les décisions de justice risquent «de faire du sinistre humoriste un martyr de la liberté d'expression, aussi vils soient ses propos». (20 minutes/ats/afp)

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