FranceLycamobile dans le viseur de la justice
La branche française de Lycamobile, l'un des leaders mondiaux des cartes prépayées à bas prix, fait l'objet d'une enquête à Paris sur un vaste système présumé de blanchiment de fonds et de fraude à la TVA.

La Brigade de recherches et d'investigations financières (BRIF) de la police judiciaire parisienne et le service national de douane judiciaire ont interpellé à Paris et en région parisienne les 15 et 16 juin 19 personnes dans le cadre d'une information judiciaire ouverte début mai et confiée à un juge d'instruction du pôle financier.
A l'issue des gardes à vue, neuf personnes ont été mises en examen vendredi pour «blanchiment de fonds en bande organisée», dont le directeur de la société Lycamobile services. D'autres ont été mises en examen en outre pour «escroquerie à la TVA en bande organisée», a précisé la source judiciaire confirmant une information du site internet BuzzFeed News, qui a révélé l'affaire. Parmi les suspects, huit ont été placés sous contrôle judiciaire et le neuvième, en détention provisoire.
L'information judiciaire fait suite à une enquête préliminaire ouverte début 2016 par le parquet national financier (PNF), alerté par des mouvements de fonds suspects au sein d'un réseau complexe d'acteurs.
La justice soupçonne notamment Lycamobile France et Lycamobile services d'avoir perçu, «sous couvert d'un commerce fictif de cartes téléphoniques», «des fonds en provenance de sociétés-écrans, sans réelle activité», et suspectées d'être liées à des activités de blanchiment, selon une source proche du dossier.
Parallèlement, les cartes téléphoniques étaient bien vendues, mais «dans le cadre d'un marché occulte par le biais de grossistes pour générer des espèces, ensuite remises à des sociétés ayant besoin d'argent liquide pour leur activité occulte». Il s'agit notamment d'entreprises du bâtiment en quête de cash pour rémunérer des salariés au noir.
La société Lycamobile Services facturant ses ventes de cartes hors taxes à des sociétés le plus souvent défaillantes, ce système se serait in fine traduit par une «fraude massive à la TVA qui permettait ainsi de revendre les cartes au-dessous du prix du marché», selon la source proche du dossier.
A ce stade, le montant des fonds présumés blanchis est estimé à 17 millions d'euros, selon la source judiciaire. Le média en ligne BuzzFeed News affirme lui que «75 millions d'euros sur neuf mois l'an dernier» ont été versées à la branche française en provenance de sociétés-écrans. Quant à la fraude à la TVA, le préjudice pour l'Etat se chiffrerait à «plusieurs millions d'euros», selon la source judiciaire.
Lors des perquisitions, les enquêteurs ont mis la main sur 130.000 euros en espèces. Environ 850.000 euros ont été saisis sur les comptes bancaires des sociétés.
Selon le quotidien The Guardian, le géant de la téléphonie «ethnique», fondé par un réfugié sri-lankais, Subaskaran Allirajah, est présenté comme le premier donateur du parti conservateur britannique, qui aurait reçu 1,5 million de livres (1,95 million d'euros) depuis 2011.
Contactée par l'AFP, Lycamobile France n'était pas disponible dans l'immédiat pour réagir.
nal/aue/thm/jpr (nxp/afp)