La loi sur le renseignement devant le peuple

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Votations 25 septembreLa loi sur le renseignement devant le peuple

Les Suisses diront le 25 septembre s'ils veulent renforcer l'arsenal à disposition des services de renseignement.

Christine Talos
avec ats
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Christine Talos
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La nouvelle loi sur le renseignement va-t-elle passer haut la main le 25 septembre dans les urnes? C'est du moins ce que semblent annoncer les premiers sondages sur cet objet soumis à l'aval du peuple. Elle gagne même toujours plus de terrain. Le 26 août dernier, un sondage Tamedia la créditait de 59% d'avis favorables, soit 4 points de plus qu'une précédente enquête début août. Un autre sondage de gfs.bern, celui-là, lui donnait à peu près le même résultat le 16 août dernier, avec 58% de «oui», contre 35% d'avis contraires.

De quoi s'agit-il? La loi sur le renseignement permettra au Service de renseignement de la Confédération (SRC) de mener des opérations intrusives. Il sera autorisé, sous certaines conditions, à s'infiltrer dans des ordinateurs, à procéder à des écoutes téléphoniques ou à poser des caméras dans des locaux privés. Actuellement, il ne peut se baser que sur des informations publiques ou disponibles auprès d'autres autorités. Dans les cas les plus graves, il faut passer par le droit d'exception pour agir.

Nouvelles menaces

Selon le Conseil fédéral, il n'est plus possible de répondre dans ces conditions aux nouvelles menaces. La Confédération et les cantons dépendent plus que jamais d'informations aussi précoces et complètes que possible pour faire face aux cyberattaques ainsi qu'à des terroristes et des espions qui profitent des progrès technologiques et de la mondialisation. La Suisse ne doit en outre plus être autant dépendante des services étrangers.

Les mesures les plus intrusives devraient se limiter à une dizaine par an. Elles cibleront le terrorisme, l'espionnage, la dissémination d'armes de destruction massive et les attaques sur des infrastructures d'importance nationale. Mais pas l'extrémisme violent.

Ces recherches spéciales seront menées en dernier recours face à une menace concrète et grave et ne pourront être mises en branle que moyennant un aval judiciaire et politique. Un système d'autorisation par étapes est prévu. Le contrôle des activités du Service de renseignement sera parallèlement renforcé.

Juste équilibre ou illusion de sécurité?

Pour ses partisans, la nouvelle loi parvient à un juste équilibre entre la nécessité de garantir la sécurité et la défense des libertés individuelles. L'activité du SRC restera ciblée. La qualité de vie en Suisse dépend d'une meilleure sécurité. Il est donc important de renforcer des moyens à disposition des services de renseignement, plaide une coalition regroupant la droite et quelques socialistes.

Le préposé fédéral à la protection des données Adrian Lobsiger considère pour sa part que la loi est un compromis entre sécurité et liberté individuelle avec lequel il peut vivre.

Mais du côté des opposants, on dénonce une «illusion de sécurité». Des attentats comme ceux de Paris, Bruxelles ou Nice n'auraient pas pu être évités de cette façon. Si l'on veut détecter des terroristes potentiels, mieux vaut passer par le travail effectué par les services sociaux ou l'école, avancent-ils.

Souvenir des fiches

La majorité de la gauche (plusieurs élus socialistes soutiennent toutefois la loi) ainsi qu'une série d'organisations préoccupées par la protection des données mettent en avant le scandale des fiches de 1989, les autres affaires qui ont ébranlé le service de renseignement ainsi que les dérives américaines dénoncées par Edward Snowden. Le camp du «non» craint que l'on se dirige vers une surveillance de masse.

Avec la nouvelle loi, on va cibler des groupes entiers et tous les citoyens deviendront des coupables présumés. Les garanties posées par la loi ne suffiront pas et pourront facilement être contournées, notamment par via les dérogations prévues, craignent les opposants.

L'interdiction d'enregistrer des signaux sur le réseau câblé si tant l'émetteur que le récepteur se trouve en Suisse ne serait que de la poudre aux yeux. La communication se fait automatiquement par l'étranger si l'on passe par des chats, Facebook ou un Cloud. Quant à l'utilisation de chevaux de Troie informatiques, elle comporterait trop de risques, préviennent-ils.

On verra donc dans les urnes si le contexte international et les récents attentats en France et en Allemagne vont pousser les Suisses à voter en faveur du projet du Conseil fédéral. Cela semble bien parti en tout cas.

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