SuisseFenêtres à bébés: une mère sur deux s'annonce
Depuis 2001, 14 enfants ont été déposés dans les lucarnes ad hoc. Sept mamans ont repris des nouvelles. Un enfant a même retrouvé ses parents biologiques.

Une femme dépose son enfant dans la fenêtre à bébé du Lindenhofspital, à Berne (reconstitution).
Il y a quelques jours, une mère laissait un nouveau-né en bonne santé dans la fenêtre à bébé d'Einsiedeln (SZ). Depuis 2001, c'est le 14e enfant (huit filles et six garçons) remis aux bons soins d'un hôpital. Ces fenêtres ont été créées sous l'impulsion de l'Aide suisse pour la mère à l'enfant (ASME). Leur but: permettre aux mères en situation d'urgence de mettre au monde un enfant, et surtout éviter le recours à l'avortement.
Selon l'association, sept mamans ont ensuite pris des nouvelles de leur nouveau-né: «Il y en a même une qui nous a appelé 20 minutes après avoir déposé son enfant, raconte Dominik Müggler, président de l'ASME. Elle voulait savoir s'il allait bien.» Les mères ne sont pas recherchées activement, mais «elles ont le droit de savoir ce qu'il advient de leur enfant», poursuit-il. Dans six cas, elles ont formellement donné leur accord pour une future adoption.» Un couple, qui a réussi à se sortir de la mauvaise passe dans laquelle il se trouvait, a par ailleurs demandé de récupérer son rejeton, requête qui a été acceptée.
Honte ou désespoir
Dominik Müggler explique que la plupart des mères abandonnent leur enfant, car «elles ne veulent pas que leur entourage sache qu'elles ont été enceintes et qu'elles ont mis au monde un bébé». Certaines femmes, souvent d'origine étrangère, ont peur d'être bannies et de se retrouver seules avec leur nouveau-né. Mais, selon le spécialiste, la plupart de celles qui ont utilisé les fenêtres sont des Suissesses. D'autres estiment ne pas pouvoir offrir d'avenir à leur enfant, «mais elles n'ont pas souhaité se faire avorter ou se sont rendu compte de leur grossesse trop tard», conclut-il.
Critiques de l'ONU
En Suisse, il existe cinq fenêtres à bébés. Outre celle d'Einsiedeln (SZ), il y en a à Davos (GR), Olten (SO), Zollikon (ZH), Berne et Bellinzone (TI). Des projets sont discutés en Valais, en Suisse orientale et dans la région de Bâle. «C'est une bonne chose, estime Dominik Müggler. L'idéal serait qu'il y en ait une dizaine. Une femme qui vient d'accoucher est souvent faible. Elle ne devrait pas avoir à faire un voyage de plus de 50 kilomètres.»
Un récent rapport de l'ONU fait néanmoins part de la «préoccupation» de la communauté internationale face au nombre grandissant de ces fenêtres en Suisse. Comme les mères qui y déposent leur bébé restent sur le principe anonyme, le droit de l'enfant à connaître son origine est bafoué. Mais la population suisse semble tenir à cette offre. Selon une enquête menée par Demoscope l'automne dernier, 61% des sondés la jugent «très utile» et 30% «assez utile».