La clause de sauvegarde activée pour toute l'UE

Actualisé

BerneLa clause de sauvegarde activée pour toute l'UE

La Suisse active la clause de sauvegarde pour limiter l'immigration liée à la libre circulation des personnes de tous les pays de l'UE. Les réactions sont contrastées.

L'Union européenne (UE), les milieux économiques, les syndicats et les partis de gauche critiquent mercredi la décision du Conseil fédéral d'activer la clause de sauvegarde. Pour le camp bourgeois au contraire, le Conseil fédéral a tenu sa promesse au peuple.

Le président du Parlement européen Martin Schulz prend acte de la décision du gouvernement, qu'il entend respecter. «J'ai de la compréhension pour les craintes» de la Suisse face à une immigration trop élevée, écrit-t-il.

L'Allemand émet toutefois des «doutes quant au bien-fondé» de cet instrument: limitée dans le temps, la clause de sauvegarde a plutôt un caractère symbolique sur le plan politique. Martin Schulz estime aussi que les chiffres ne justifient pas forcément son activation.

Relations diplomatiques

Regrettant la décision du Conseil fédéral, la cheffe de la diplomatie de l'UE Catherine Ashton rappelle qu'en 2008 et 2009, la clause de sauvegarde n'avait pas été invoquée bien que les conditions aient été réunies. Pour la commissaire européenne aux affaires extérieures, la Suisse comme l'UE profitent de la libre circulation des personnes. En limitant l'arrivée de travailleurs européens, Berne ne tient pas compte de ces «grands avantages».

Faisant écho à ces propos, Economiesuisse estime que l'introduction de quotas d'immigration à l'égard des pays de l'UE-25 «pèsera considérablement sur les relations bilatérales alors qu'elle aura des conséquences marginales sur le bilan migratoire». Les acteurs économiques concernés doivent s'attendre à rencontrer des difficultés en matière d'embauche, prévient la faîtière.

L'Union patronale suisse (UPS), une partie de l'Union suisse des arts et métiers (usam) et certaines branches très concernées par la main d'oeuvre étrangère, comme la construction ou l'hôtellerie-restauration, redoutent une surcharge administrative pour les employeurs et les travailleurs. La mise en oeuvre de la clause de sauvegarde «doit se faire le plus simplement possible et avec souplesse», demande le directeur de l'UPS Thomas Daum.

Report sur les permis L

Pour la société suisse des entrepreneurs, la limitation du contingentement à des titulaires de permis B «ne restreint pas l'immigration, mais la transfère tout au plus aux détenteurs d'un permis de séjour de courte durée (type L)». Dans la pratique, cela débouche d'une certaine manière sur la «réintroduction du statut de saisonnier».

Une crainte partagée par les syndicats, qui s'inquiètent d'une précarisation des emplois. Comme eux, le PS et les Verts demandent un renforcement des mesures d'accompagnement pour lutter contre la sous-enchère salariale.

Il est regrettable que l'on doive attendre des mesures concrètes pendant que le gouvernement s'en tient à des décisions symboliques, a déclaré le président du PS Christian Levrat. En fait, chacun reconnaît que ce retour aux contingents de travailleurs étrangers limité dans le temps n'aura que peu d'effets sur l'immigration.

Promesses

Les partis de droite mettent d'abord en avant l'importance de tenir ses promesses. L'activation de la clause était prévue à certaines conditions et celles-ci sont remplies: il faut être conséquent, estime la porte-parole du PDC Marianne Binder.

Le président du PLR Philipp Müller souligne aussi que l'extension de cet instrument à l'ensemble des pays de l'UE et plus seulement aux huit de l'Est a le mérite de répondre aux accusations de discriminations entendues l'an dernier. Il n'empêche, le fait d'avoir privilégié la situation intérieure aux contingences extérieures ne va pas faciliter la politique étrangère de la Suisse, admet-il.

Comme la gauche, les partis bourgeois admettent que la décision gouvernementale est avant tout justifiée par des considération de politique intérieure, en particulier pour combattre l'initiative populaire de l'UDC «contre l'immigration de masse».

Vendue au peuple comme l'«arme miracle» à l'époque de la libre circulation, la clause de sauvegarde montre cependant ses limites, notamment dans la durée, écrit l'UDC. Et d'affirmer que seule son initiative est à même de véritablement maîtriser l'arrivée d'étrangers.

Un instrument parmi d'autres pour piloter l'immigration

La clause de sauvegarde n'aura qu'un petit effet sur l'immigration, a reconnu mercredi devant la presse Simonetta Sommaruga. C'est un instrument parmi d'autres pour piloter l'immigration et seule la somme des mesures permettre de régler les problèmes, a estimé la ministre de justice et police. L'immigration nécessite des décisions politiques. Elle ne peut pas être laissée à l'appréciation des milieux économiques, a précisé la conseillère fédérale. Selon la socialiste, les conditions de départ n'ont pas changé depuis l'année dernière et le Conseil fédéral respecte donc la ligne qu'il s'était fixée.

Ton opinion