Le scepticisme face à l'islam grandit

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SondageLe scepticisme face à l'islam grandit

Les événements tragiques des derniers jours ont eu un peu raison de la tolérance des Suisses, selon le sondage en ligne mené par «20 minutes».

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daw/dmz
Pas moins de 75% des Suisses se disent dérangés par les femmes qui portent le voile.

Pas moins de 75% des Suisses se disent dérangés par les femmes qui portent le voile.

photo: Keystone/Gabriele Putzu

Novembre 2015, Paris: 130 personnes meurent dans des attentats. Mars 2016, Bruxelles: des kamikazes tuent 30 personnes dans le métro et à l'aéroport. Juillet 2016, Nice: un camion fou tue 84 personnes. Ces tragédies ont récemment secoué l'Europe. Un sondage mené par «20 minutes» (lire encadré) a souhaité analyser l'impact de ces attentats. Mardi, on apprenait que le sentiment d'insécurité se répand.

L'enquête démontre aussi que le terrorisme a changé l'attitude de la population suisse envers l'islam. Pas moins de 16% des participants ont confié que leur vision de tous les musulmans en a pris un coup. Ils sont 41% à avoir renforcé leur ressentiment face à ceux qui pratiquent un islam strict (voir graphique).

La peur se reflète aussi dans les rencontres quotidiennes: presque un Suisse sur deux dit qu'il se sent mal à l'aise lorsqu'il est assis près d'une personne qu'il imagine être un musulman conservateur dans un bus, un train ou un avion. Pas moins de 73% se disent gênés de voir une femme qui porte le voile.

Danger ou pas?

Les jeunes sont ceux qui ont la vision la plus positive de l'islam. Dans l'ensemble de la population, le rapport à cette religion est très divisé. Plus de la moitié des répondants (53%) y voient un danger pour le pays ou pensent que les musulmans vivent dans une société parallèle. Le reste (47%) pense qu'il ne faut pas être trop suspicieux et qu'ils sont bien intégrés.

Farhad Afshar, président de la coordination des organisations islamiques suisses (Kios), ne se dit pas surpris par ces résultats: «Ce sont les musulmans eux-mêmes qui souffrent le plus de l'islamisme politique, explique-t-il. Dans le climat actuel, des femmes sont souvent marginalisées parce qu'elles portent le voile. Dans les écoles aussi des enfants musulmans sont laissés de côté par leurs camarades. Et à cet âge, on ne fait pas la différence entre islam et islamisme.»

Il souligne toutefois, que, selon lui, les musulmans sont mieux intégrés en Suisse qu'en Allemagne ou en France. «La Suisse pourrait être un modèle d'intégration des minorités. Le danger ne vient pas des musulmans, mais des personnes désocialisées. Ce qui fait qu'ici, des attaques comme celles qu'ont vécu nos voisins sont hautement improbables», analyse le spécialiste.

En ce qui concerne le succès du «syndicat du crime de l'Etat islamique» et la vague de migrants qui touche l'Europe, les Etats occidentaux ont leur responsabilité, estime Farhad Afshar. «Les vraies causes» résident dans les violations graves du droit international par certains pays de l'Ouest et la destruction par la force militaire d'Etats comme l'Afghanistan, l'Irak, la Syrie ou la Libye.»

Bon pour l'interdiction de la burqa?

Pour le conseiller national Walter Wobmann (UDC/SO), père de l'initiative sur les minarets, le sondage prouve bien que «l'islam radical est perçu comme une menace.» «Il faut être aveugle pour ne pas voir qu'il se rapproche», poursuit-il.

Selon lui, on attend des politiciens qu'ils se distancient des extrêmes. «Or les autres partis de ce pays et les principaux courants religieux pratiquent la politique de l'autruche», regrette l'élu. Il pense par ailleurs que même les musulmans modérés ne prennent pas clairement position contre les radicaux.

En tant que coprésident du comité d'Egerkingen, il participe à la récolte de signatures pour une initiative demandant l'interdiction de la burqa en Suisse. Le fait que près des trois-quarts des participants se disent dérangés par le voile le conforte dans son idée. «Dans la rue, je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui ne voulait pas signer», conclut-il.

Sur l'enquête

Sur l'enquête

Exactement 18'826 personnes de tous le pays ont participé à cette enquête les 25 et 26 juillet derniers. Les politologues Fabio Wasserfallen et Lucas Leeman ont ensuite pondéré les résultats afin qu'ils correspondent au mieux à la structure socio-démographique du pays. La marge d'erreur est d'environ 1,4%.

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