Quand la politique s'invite au milieu des sites pornos

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SuisseQuand la politique s'invite au milieu des sites pornos

En campagne contre la loi sur le renseignement, les Jeunes socialistes ont détourné une photo de Guy Parmelin. Le procédé ne fait pas l'unanimité.

Mirko Martino
par
Mirko Martino
Au milieu des corps dévêtus, la légende dit: «Guy veut regarder».

Au milieu des corps dévêtus, la légende dit: «Guy veut regarder».

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Depuis une semaine, Guy Parmelin fait la une de l'actualité. Mais le nouveau conseiller fédéral ne devait pas s'attendre à voir son portrait sur des sites pornos. Un clic sur sa photo renvoie à un tout autre univers: le comité référendaire contre la loi sur le renseignement (LRens).

Ce détournement est l'oeuvre de la Jeunesse socialiste. Fabian Molina, son président, s'explique: «Nous voulons montrer que la LRens permettra aux autorités de surveiller, sans raison et de manière préventive, la vie privée des citoyens.» Le Vaudois est visé, puisqu'il dirigera le Département fédéral de la sécurité et de la défense, qui chapeaute les espions du pays.

«Il s'agit une tentative d'instrumentalisation des médias et de l'image d'un conseiller fédéral au profit d'une campagne politique, relève André Simonazzi, porte-parole du Conseil fédéral. Nous n'entendons pas donner de l'eau au moulin d'un tel geste par des commentaires supplémentaires.»

Même s'il est contre la LRens, le Parti socialiste ne soutient pas la démarche de ses jeunes. «C'est une action pubertaire, admet son porte-parole, mais pas choquante ou violente. Il vaut mieux en rire.» Du côté des jeunes libéraux-radicaux vaudois, le procédé surprend. «Il y a d'autres moyens pour faire comprendre que cette loi n'est pas la bonne solution, soutient Oriane Engel, leur présidente. Ce n'est pas en s'abaissant à ces méthodes qu'on peut faire valoir les réels arguments.»

Finalement, le moins choqué est Dylan Karlen, à la tête des jeunes UDC vaudois et professionnel de la communication: «C'est dommage d'attaquer Guy Parmelin à peine une semaine après son élection. Mais c'est de bonne guerre.»

Le détournement? Une habitude de jeunesse

Lors de la campagne pour l'initiative contre les salaires abusifs, un photomontage montrait trois grands patrons, dont Daniel Vasella, nus. Le Tribunal fédéral avait rejeté la plainte de l'ex-PDG de Novartis, la liberté d'expression étant plus large lorsqu'il s'agit de satire. De l'autre côté de l'échiquier politique, le détournement est aussi en vogue, comme en février dernier avec la photo du baiser de Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, à Simonetta Sommaruga. «Les jeunesses de partis sont aussi là pour amener le débat de manière différente», dédramatise l'UDC Dylan Karlen.

«Ils ne visaient pas les internautes»

«La cible, ce ne sont pas les visiteurs de ces sites, mais les journalistes, pour qu'ils traitent le sujet, décrypte Damien Magne­nat, spécialiste de la publicité sur le web chez Suisseo. La force est que le porno est associé à la vie privée. Le message que l'Etat pourrait regarder tout ce que vous faites est efficace. Mais cela aurait pu être plus subtil, car il y a d'autres domaines sensibles, comme les données médicales. Ce qui est sûr, c'est que cela n'a pas coûté cher.» Deux cents francs, selon Fabian Molina, de la Jeunesse socialiste.

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