«La police l'a visée comme un chien»

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Suissesse tuée en Tunisie«La police l'a visée comme un chien»

Une sexagénaire helvético-tunisienne a été tuée en Tunisie mercredi en début de soirée. Son frère témoigne depuis la Tunisie.

Une femme de 67 ans, double nationale, Suissesse et Tunisienne, a été tuée mercredi à 18h10, à Dar Chaabane, au Nord du pays (voir carte). Elle se trouvait avec une douzaine d'autres femmes sur une terrasse surplombant la rue dans laquelle se déroulait une manifestation, a raconté son frère à la Radio Suisse Romande (RSR). La sexagénaire avait prévu de rentrer en Suisse jeudi. Une information confirmée par le DFAE jeudi, en fin de matinée.

Touchée à la gorge, «sous son oreille», la femme est décédée sur place, a expliqué son frère. «J'ai téléphoné à la sécurité civile, à la centrale de police et à l'hôpital pour qu'ils envoient une ambulance, mais personne n'a répondu, ajoute-t-il. Je l'ai finalement emmenée à l'hôpital, morte sur une planche dans ma camionnette.» «La police l'a visée comme si c'était un chien», se lamente le frère de la défunte au micro de la RSR.

D'après son témoignage, deux autres personnes, «un gamin de 11 ans qui a reçu une balle dans la tête» et un jeune homme de 27 ans, ont également été tués «en moins d'une heure», mercredi soir. Avec le mari de la victime, attendu jeudi après-midi en Tunisie, le frère prévoit de déposer plainte contre les forces de sécurité. Mariée à un Suisse, elle vivait dans le nord vaudois.

Adel Tajouri, un des neveux de la victime installé en Suisse, est en colère: «On était inquiet de savoir qu'elle était là-bas, on lui avait d'ailleurs demandé de ne pas quitter l'appartement. Pour moi, la police a fait exprès. Elle était sur le balcon! Rendez-vous compte, on tire sur les gens qui sont sur un balcon! Cela ne se fait pas, on n'est pas à la chasse au chevreuil en pleine montagne! Rien que mercredi, il y a eu 15 morts.»

«L'autre chose inacceptable, c'est qu'il n'y avait personne pour la soigner. Son frère a dû l'amener lui-même à l'hôpital, après avoir fait le tour du bled pour passer les barrages, après il n'y avait personne non plus à l'hôpital.» Il précise que la défunte suissesse avait adopté une petite fille de 8 ans.

«L'enterrement aura lieu vendredi, après la prière. Elle reposera à côté de son père. Je ne pourrai hélas pas y être, il n'y a plus de vol pour la Tunisie là. En Tunisie, nous n'avons pas de ressources naturelles. C'est donc le tourisme qui fait vivre le pays. Avec ce qui se passe actuellement, le pays va mourir. La saison est déjà foutue avec cette histoire.»

Contrairement à ce qui avait été initialement annoncé par la RSR, la direction du CHUV a affirmé à l'ATS que la femme ne figurait pas parmi ses employés.

Mise en garde du DFAE

Dans ce contexte, le DFAE a actualisé jeudi ses recommandations aux voyageurs. «Tant que la situation n'est pas clarifiée, il est déconseillé de se rendre en Tunisie pour des voyages touristiques ou autres qui ne présentent pas un caractère d'urgence», écrit-il sur son site Internet. «Une dégradation de la situation sécuritaire est possible», ajoutent les services de Micheline Calmy-Rey, estimant qu'»il faut compter» avec de nouvelles violences.

Le DFAE rappelle que des affrontements entre opposants et forces de sécurité causent blessés et morts.

(20 minutes/ats)

Au moins 66 morts

La présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), Souhayr Belhassen, a affirmé jeudi à l'AFP détenir une liste nominative de 66 personnes tuées depuis le début des troubles en Tunisie mi-décembre, dont 8 dans la nuit dans la banlieue de Tunis, dénonçant «un massacre qui continue».

«Nous avons une liste nominative. On a recensé 58 morts depuis le début des troubles, hors Tunis. On vient de recevoir confirmation de 8 morts et 50 blessés dans la nuit dans l'agglomération de Tunis», a déclaré Mme Belhassen.

«C'est un massacre qui continue. La priorité des priorités aujourd'hui et d'arrêter ce massacre», a-t-elle ajouté.

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