Procès du médecinLe procureur demande l'acquittement
Si l'expertise médicale judiciaire ne conclut à aucune faute de la part du cardiologue, jugé depuis lundi pour homicide par négligence, des témoignages mardi pointent du doigt des erreurs commises en 2006.
L'avocat de la famille du défunt, qui a perdu la vie en 2006 après une intervention chirurgicale sur des artères, a fait citer à comparaître mardi matin deux médecins. Et leurs témoignages ne semblent pas avoir plaidé en faveur du cardiologue sur le banc des accusés.
Professeur exerçant à la fois à l'Hôpital cantonal de Fribourg et à la clinique privée lausannoise Cécil, Jean-Jacques Goy pratique depuis des décennies des coronographies et des angioplasties (ndlr: technique médicale pour déboucher ou élargir une artère). Ces mêmes actes médicaux que la victime a subis en mai 2006 à la clinique La Source pendant près de 4 heures.
Querelle d'experts?
Mais le professeur Goy, qui a eu accès à l'ensemble du dossier pour mener une contre-expertise, est plus sévère sur les actes et le «manque de stratégie» du prévenu. Bien qu'il refuse de parler de fautes commises, il affirme qu'il n'aurait pas agi comme son confrère dans une situation similaire: «Je me fixe en général un temps limite d'une heure environ d'intervention lors d'une angioplastie. Au-delà, j'abandonne car on sait que la probabilité de réussir est alors faible, quitte à recommencer quelques jours après.»
L'insistance avec laquelle le cardiologue accusé a utilisé le même matériel (un fil guide)pour tenter en vain de déboucher des artères, au point de le casser dans le corps du patient est aussi critiquée.
Quant à la dose médicamenteuse de 500 ml administrée au patient, le professeur Goy la juge «excessive». Même constat sévère sur l'heure perdue avant que l'accusé ne passe des téléphones auprès de confrères pour parvenir à faire transférer le patient au final à la clinique Cécil, plus apte à gérer ce type de graves complications.
«Le médecin aurait dû tout de suite appeler le CHUV, dès que les complications sont apparues, constate le professeur Goy. Plus on attend, plus on a des chances que ça s'aggrave. C'est une heure de trop qu'il n'aurait pas fallu perdre. (...) Or, à 19h42 déjà, la situation semblait dramatique en voyant les images médicales.»
Puis c'est au tour du docteur Guido Schnyder de venir témoigner. Il est notamment co-responsable du «plateau technique» d'une salle à la clinique La Source. Selon lui, les images médicales le soir de l'intervention litigieuses «parlent d'elles-mêmes». C'est pourquoi, lui et deux autres médecins de La Source ont convoqué dès le lendemain le cardiologue afin de lui signifier qu'il ne pourrait plus opérer seul dans cet établissement médical.
«Dès qu'on est face à une situation difficile, on doit demander l'avis d'un autre confrère, souligne Guido Schnyder. Nous reprochions au Dr B. de ne pas avoir fait appel à l'un d'entre nous ce jour-là avant de commencer l'angioplastie. Nous ne lui reprochons pas l'apparition de complications durant l'acte, mais la prise en charge de ces complications une fois apparues.»
Le procureur abandonne l'accusation!
Lors de son réquisitoire, mardi après-midi, Le ministère public a abandonné l'accusation d'homicide par négligence. Selon lui, à l'aune des témoignages et du rapport d'expertise, on ne peut pas reprocher une violation des règles de l'art de la part du cardiologue prévenu.
Plaidoiries des avocats mercredi matin.