Le champagne qui dérange«Quand on gagne, on a envie de fêter, c'est normal»
Pour des raisons de prévention, et pour l'image du sport, Swiss Olympic souhaite ne plus voir des skieurs déboucher le champagne dans l'aire d'arrivée. La skieuse vaudoise Aline Bonjour trouve la démarche exagérée.
La publication dans les médias d'images montrant les skieuses suisses Nadia Styger et Fränzi Aufdenblatten une bouteille à la main en train de fêter leur doublé lors du Super-G de Val d'Isère de dimanche, dérange l'organisation faîtière des fédérations sportives suisses, qui veut sensibiliser les athlètes au problème.
Adrian von Allmen, membre du programme «Cool and Clean» de Swiss Olympic, s'est exprimé mercredi matin sur les ondes de la RSR, revenant sur une information du Matin: «Les athlètes ont le droit de fêter une victoire. Mais dans le cadre de la prévention, ils sont des modèles très efficaces. Le lien entre succès et alcool nous pose problème».
Le cinéaste du sport et journaliste Pierre Morath déplorait cette réaction de Swiss Oympic, toujours sur les ondes de la RSR. Il estimait paradoxal d'interdire ce genre d'images de spontanéité pour des raisons de prévention alors qu'on laisse les sportifs se présenter couverts de sponsors. Pour Pierre Morath, les pressions d'un sponsor
soucieux de son image pourraient être à l'origine de ces mesures.
Une hypothèse que dément fermement Swiss Olympic: «Notre démarche n'a rien à voir avec les sponsors. Nous n'avons eu aucune réaction de leur part», explique Rita Bürgi, responsable du programme «Cool and Clean» chez Swiss Olympic. L'association travaille donc à un concept pour sensibiliser les athlètes et les jeunes au problème.
«Tout se fête avec de l'alcool»
Directeur de la Croix-Bleue romande (ndlr: organisme de prévention et de traitement de l'alcoolisme), Francis Rapin qualifie la réaction de Swiss Olympic «d'un peu excessive». «Voir ces deux skieuses en train de boire du champagne pour fêter une victoire ne me choque pas particulièrement». Reste que, pour le directeur, le problème est plus général. «Dans notre société, on ne sait plus faire la fête sans que l'alcool y soit associé. Et c'est notamment le cas chez les jeunes».
Un contexte spécial
Spécialiste des disciplines techniques et contactée par 20 minutes online, la Vaudoise Aline Bonjour (24 ans) ne comprend pas vraiment les soucis et la démarche de Swiss Olympic. «Personnellement, ça ne me dérange pas que des sportifs célèbrent leurs succès en buvant du champagne. On voit ça dans plein d'autres sports. Quand on gagne, on a envie de fêter, c'est tout à fait normal! Dans le cas de Nadia (Styger) et Fränzi (Aufdenblatten), il faut aussi tenir compte du contexte. A Val d'Isère, elles ont réussi un doublé, ce qui n'était plus arrivé depuis longtemps dans le clan suisse! Et c'était la première victoire de Fränzi en Coupe du monde».
Si elle n'a encore jamais connu les joies de la victoire sur le cirque blanc, Aline Bonjour explique qu'elle a déjà fêté des victoires sur le plan national en buvant du champagne. «Si j'en ai un jour l'occasion en Coupe du monde, je ne verrai aucun mal à le faire, même devant des caméras de télévision.»
«Quelques gorgées, ce n'est pas de la dépendance»
La citoyenne de Chailly-sur-Montreux estime qu'un sportif qui boit du champagne dans un contexte de victoire ne donne certainement pas une image de dépendance à l'alcool. «Je fais d'ailleurs partie du programme cool and clean de Swiss Olympic. Le but est de montrer que l'on peut pratiquer un sport dans un corps sain, sans être dépendant à des substances dopantes ou autres. Boire quelques gorgées de champagne ne va pas à l'encontre de ce message.»