Vaud/GenèveSalariés démunis face à la hausse du prix des pâtes et du beurre
Le coût de la vie augmente, la rue gronde et les appels à ajuster les salaires se multiplient. Mais voilà: rien n’oblige un employeur à le faire.
Chauffeurs de bus, fonctionnaires ou maçons, tous ont récemment été ou vont être en grève prochainement avec à la clé une même exigence: l’adaptation des salaires au coût de la vie. Celui-ci a bondi (lire l’encadré), dopé par l’explosion des prix de l’énergie et des matières premières, ou encore par les difficultés d’importation. Pour le coup, sans augmentation de très nombreux employés du privé et du public perdent du pouvoir d’achat et s’appauvrissent.
Dans le privé, pas de règles
Indexer les salaires au renchérissement est pourtant une gageure. Et pour cause, «rien dans la loi ou le Code des obligations n’oblige un employeur privé à mieux payer son personnel parce que l’électricité et les pâtes sont devenues plus chères», relève Me Audrey Pion, spécialiste du droit du travail. Cela se discute entre le patron et ses collaborateurs, au bon vouloir du premier.
Nuance, tout de même: «Dans les branches soumises à une convention collective de travail (CCT), la très grande majorité comprend une clause qui prévoit une possible indexation des salaires», note l’avocate genevoise. Cette disposition doit cependant être renégociée à chaque renouvellement de la CCT. Dans les secteurs non conventionnés, en revanche, il n’existe aucun levier pour les salariés, «si ce n’est le bon sens, remarque Me Pion. Lorsque l’écart entre le salaire et le coût de la vie devient important, l’employeur a intérêt à réfléchir aux demandes de son personnel, pour éviter des démissions qui peuvent coûter cher à l’entreprise.»
Secteur public favorisé
Dans le service public, les choses sont un peu différentes. Les Cantons de Vaud et Genève, par exemple, prévoient par principe d’adapter le revenu des fonctionnaires aux prix à la consommation. «Mais ce n’est pas une obligation, souligne Philippe Chaubert, chef du Service du personnel de l’État de Vaud. La mesure est à la discrétion du Conseil d’État.» Idem au bout du lac, où un projet de loi tout juste déposé par le député Jean Batou (Ensemble à Gauche) entend d’ailleurs supprimer cette façon de faire. Le texte veut obliger le Canton à des indexations automatiques, tandis que les dépenses financières seraient compensées par une hausse fiscale des grosses fortunes.
Sur les bords du Léman, il n’y a cependant pas une approche unifiée du parapublic. À Genève, Université, Hôpital cantonal ou EMS appliquent la même politique salariale que dans l’administration. Pas les Transports publics, qui ont leur propre statut du personnel. Les EMS ou les foyers sociaux vaudois, eux, ont une CCT qui prévoit une indexation salariale.
Reste que le contexte de crise actuel a poussé les deux gouvernements à agir. Pour la première fois depuis une décennie, le budget de l’État de Vaud prévoit une hausse (pas encore chiffrée) des rémunérations par rapport au coût de la vie. L’Exécutif genevois entend aussi adapter la paie de son personnel. Mais pour des raisons légales en matière de déficit, selon lui, il n’accordera «que la moitié de l’indexation prévue, soit 1,35% au lieu de 2,7%».