Centres fédéraux - Amnesty dénonce des maltraitances, voire de la torture

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Centres fédérauxAmnesty dénonce des maltraitances, voire de la torture

Ouverts il y a deux ans, les Centres fédéraux pour les requérants sont la cible de graves accusations dans un rapport de l’ONG. Le Secrétariat d’État aux migrations conteste la noirceur du tableau.

Le Secrétariat d’États aux migrations a confié la gestion des centres à des agents de sécurité dont le professionnalisme est mis en cause par Amnesty International.

Le Secrétariat d’États aux migrations a confié la gestion des centres à des agents de sécurité dont le professionnalisme est mis en cause par Amnesty International.

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Le bras de fer continue autour des accusations de maltraitances dans les Centres fédéraux pour requérants d’asile ouverts en 2019. Dans un rapport diffusé ce mercredi, Amnesty International Suisse porte des accusations graves contre la gestion de ces centres où les requérants sont confiés à la garde d’agents de sécurité privés.

Amnesty rappelle le contexte de ses investigations: «Après avoir pris en main l’exploitation des centres fédéraux d’asile en mars 2019, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) a sous-traité les tâches relevant de la sécurité à des sociétés privées, notamment Protectas SA et Securitas SA. Amnesty a d’abord été alertée par des collaborateurs d’encadrement et des agents de sécurité inquiets des abus et des mauvais traitements infligés aux requérants d’asile, puis par les victimes elles-mêmes et par les représentants juridiques intervenant ou étant intervenus dans les centres fédéraux d’asile».

De Bâle à Vallorbe

Le rapport décrit des abus qui ont eu lieu entre janvier 2020 et avril 2021 dans les centres de Bâle, Chevrilles, Boudry, Altstätten et Vallorbe. L’organisation précise qu’elle a conduit des entretiens avec 32 personnes dont quatorze victimes d’abus et dix-huit agents de sécurité en fonction ou ayant quitté. Ces abus concernent «des coups, le recours à la contrainte physique au point de restreindre la respiration et d’engendrer une crise d’épilepsie, l’évanouissement et des difficultés à respirer suite à l’inhalation de spray au poivre ou encore la détention dans un container métallique en état d’hypothermie»

Container comme «salle de réflexion»

L’organisation fait part de sa préoccupation quant à l’utilisation d’une «salle de réflexion» par des agents. En fait, il s’agit «d’un container métallique à l’extérieur du centre utilisé comme cellule de détention improvisée et moyen punitif». Les personnes entendues dénoncent «l’attitude hostile, les préjugés et le racisme visant les résidents des centres». Des agents relèvent «le comportement agressif, provocateur et méprisant de certains de leurs collègues envers les personnes hébergées». Amnesty International estime que dans certains cas: «Ces pratiques pourraient être assimilables à de la torture ou à d’autres mauvais traitements et pourraient, de ce fait, violer les obligations de la Suisse en vertu du droit international».

L’organisation espère qu’à la lumière de ce rapport, le Gouvernement helvétique doit «cesser de penser que ces actes sont uniquement le fait de quelques «pommes pourries». Il doit s’atteler à résoudre les problèmes systémiques urgents et prendre des mesures pour prévenir les mauvais traitements, éliminer le racisme et protéger les droits des personnes dans les centres fédéraux d’asile».

Le SEM rejette les allégations de torture

Au courant de la parution du rapport, le SEM avait déjà préparé sa réponse mardi: «Nous rejetons formellement, en particulier les allégations selon lesquelles les droits de l’homme seraient systématiquement violés dans les Centres fédéraux et les requérants «torturés». Cela signifierait que des douleurs ou des souffrances seraient délibérément infligées aux requérants d’asile afin de leur extorquer des informations, de les intimider ou de les punir».

Le SEM n’apprécie pas du tout l’attaque d’Amnesty International, «qui le place ainsi, en tant qu’autorité étatique de notre pays, sur le même plan que les régimes de non-droit et les dictatures militaires, ce qui n’a rien à voir avec la réalité des Centres fédéraux et la sécurité juridique dont bénéficie toute personne vivant en Suisse».

Cependant, le SEM a annoncé la semaine dernière l’ouverture d’une enquête. L’ancien juge fédéral Niklaus Oberholzer a été mandaté par le secrétaire d’État Mario Gattiker pour faire la lumière «sur plusieurs incidents à propos desquels des reproches ont été exprimés faisant état de mesures coercitives injustifiées et de comportements incorrects». Le SEM précise qu’il n’accepte pas qu’une «coercition disproportionnée» soit utilisée contre des requérants d’asile et continue «de sanctionner systématiquement tout comportement incorrect».

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