AutomobileJaguar veut inciter les jeunes friqués à passer à l'électrique
Si elle entend conserver ses riches amateurs habituels, la marque britannique, dont le propriétaire est le géant indien Tata, lorgne aussi une clientèle plus branchée.
Jaguar veut convaincre des clients plus jeunes et plus riches que sa clientèle actuelle de passer à la voiture à batterie, alors que les marques de luxe hésitent face au virage électrique. La marque du groupe britannique Jaguar Land Rover (JLR) présentait à la presse européenne, vendredi à Paris, un prototype très bas, aux lignes massives et au très long capot.
Cette Jaguar «Type OO» préfigure une berline électrique attendue mi-2026 à un tarif de base d’environ 150'000 euros, soit le double des modèles actuels de la marque. «Nous devons être exubérants, modernes», a lancé vendredi le directeur de la marque, le Britannique Rawdon Glover.
Le virage de Jaguar n’est pas du goût de tout le monde: le premier clip annonçant sa nouvelle identité, avec ses tons roses et des mannequins de tous âges et toutes origines, a suscité fin 2024 des moqueries et des critiques parfois violentes. Trois autres modèles à batterie sont prévus sur cette même ligne: Jaguar renaît en version 100% électrique, tandis que les SUV Range Rover continueront à être vendus en version hybride, essence ou diesel.
«Jaguar veut bousculer le marché et sera copié»
Avec ses énormes roues et sa calandre massive, terribles pour l’aérodynamisme de la voiture, la Type 00 affiche un design «loin des stéréotypes de la voiture électrique», souligne Rawdon Glover. Le modèle de série promet 700 kilomètres d’autonomie 100% électrique et des versions d’une puissance de 1000 chevaux, qui sous-entendent l’usage de lourdes batteries dont Jaguar n’a pas donné le détail.
Connue pour ses berlines statutaires et ses coupés sportifs, la marque avait une gamme vieillissante et ses ventes baissaient, à 59'000 unités en 2024: son propriétaire, le conglomérat indien Tata, a décidé de mettre le félin au repos pour préparer son électrification. L’usine historique de Castle Bromwich, près de Birmingham (centre de l’Angleterre), a arrêté sa production en mai 2024.
Pour l’analyste britannique Danni Hewson, de la plateforme d’investissement AJ Bell, «Jaguar veut bousculer le marché et son bassin d’acheteurs, en visant des automobilistes plus aisés qui auraient pu par le passé opter pour Porsche ou Bentley». La marque «a attiré les regards et (...) lorsque le premier de ses nouveaux modèles sortira des chaînes de production, sa stratégie sera étudiée et potentiellement copiée dans les années à venir».
«Aujourd’hui, la richesse arrive beaucoup plus tôt dans la vie des gens»
Aston Martin, Bentley, Maserati et d’autres marques de voitures de luxe ont repoussé progressivement leur transition vers les voitures à moteur électrique, face à l’intérêt poli de leurs acheteurs fortunés. Range Rover, la marque cousine de Jaguar, a elle-même retardé la sortie de la version électrique de son SUV. Jaguar veut garder une partie de ses clients actuels, mais aussi toucher un «public urbain, plus jeune» d’acheteurs d’automobiles, entre 35 et 50 ans, a souligné Rawdon Glover.
«Il y a encore 20 ans, les véhicules de luxe étaient très largement le domaine des hommes d’une cinquantaine d’années, car c’est à partir de ce moment-là qu’ils les acquéraient (...) Ce monde a changé (...) Aujourd’hui, la richesse arrive beaucoup plus tôt dans la vie des gens», analyse le patron de Jaguar. Il s’agit aussi de convaincre la Chine, un marché friand de voitures électriques, où le groupe JLR recule à l’instar de Mercedes ou d’Audi au profit des marques locales.