LausanneCinq millions détournés du CHUV
Julien Bogousslavsky, l'ancien chef du service de neurologie du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), devra rendre des comptes à la justice pour ses malversations financières.
Le trou est apparemment plus important que prévu. Selon l'acte d'accusation, le montant des détournements effectués par le médecin atteindrait désormais 5,3 millions de francs.
Le neurologue de 55 ans sera jugé par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne. Il est accusé d'abus de confiance qualifié, escroquerie, gestion déloyale qualifiée, faux dans les titres et/ou de gestion déloyale des intérêts publics. Le montant articulé pourrait être revu à la baisse par le tribunal, tout comme le chef d'accusation. Vu les enjeux, des recours devant le Tribunal d'accusation ne sont pas exclus.
Le montant des détournements retenus à son encontre a nettement gonflé depuis la révélation de l'affaire en avril 2006. Le médecin était alors soupçonné d'avoir détourné entre 1,1 et 2,1 millions de francs entre 2003 et 2005. L'acte d'accusation retient désormais un montant de quelque 5,3 millions de francs, prélevé entre janvier 2000 et avril 2006.
Son avocat, Me Olivier Freymond, n'a pas voulu se prononcer sur les chiffres retenus par le juge d'instruction. «Je veux d'abord analyser les faits retenus et en parler avec mon client», a-t-il déclaré jeudi à l'AP. A l'époque Julien Bogousslavsky admettait toutefois avoir glissé dans sa poche environ un million de francs, et en avoir remboursé plus tard 300.000 francs.
Factures fantaisistes
Il est soupçonné d'avoir prélevé abusivement dans les comptes au moyen de factures fausses ou fantaisistes et de n'avoir pas transmis au CHUV des fonds reçus de compagnies pharmaceutiques pour financer des mandats de recherche exécutés au moyen des ressources de l'hôpital.
Les montants détournés aurait servi à assouvir sa passion des livres rares: des éditions originales de Charles-Ferdinand Ramuz ou des ouvrages médicaux. A l'époque, le professeur avait reconnu la gravité des faits et s'était dit prêt à rembourser le montant du préjudice.
L'affaire avait été découverte le 28 novembre 2005, au hasard d'un contrôle du service de la comptabilité du CHUV. Une facture de 130.000 francs transmise par le professeur pour être payée à une société parisienne sans existence juridique et physique avait éveillé les premiers soupçons et conduit à l'ouverture d'une enquête administrative.
Audits
Licencié avec effet immédiat en avril 2006, le professeur, réputé dans son domaine, a par la suite retrouvé un emploi au sein du groupe Genolier, où il exerce toujours, selon son avocat.
Cette affaire avait débouché sur une vaste enquête sur la gestion financière du CHUV et de la Faculté de biologie et de médecine. Des milliers de pièces comptables ont été examinées par la société PriceWaterhouseCoopers qui a décelé quelques dizaines d'autres cas d'irrégularités et d'erreurs. Le conseiller d'Etat Pierre-Yves-Maillard avait en outre pris des mesures immédiates pour renforcer la vérification de l'utilisation des fonds de service et de recherche du CHUV. Il avait notamment supprimé les cartes de crédit individuelles et introduit la systématisation des doubles signatures. (ap)