Guerre en UkraineDe l'avis général, Poutine a gagné la partie avec Trump
Le président russe n'a quasiment rien cédé mardi tout en préservant sa relation privilégiée avec Washington, qui s'en félicite.

Le président russe n'a rien cédé, sans fâcher Washington.
XPour une fois, analystes russes et occidentaux convergent: l’entretien mardi entre Donald Trump et Vladimir Poutine a tourné à l’avantage du second, qui n’a fait aucune concession significative vers un scénario de cessation des hostilités en Ukraine. A l’issue d’une conversation de deux heures, la Maison-Blanche et le Kremlin ont accouché d’un communiqué chacun, dont les différences de termes suscitaient mercredi des commentaires unanimes.
Accord relativement vague
Les deux présidents sont convenus d’un cessez-le-feu limité aux infrastructures énergétiques (centrales électriques, transformateurs, gazoducs, etc.) pour un mois, mais pas d’une trêve générale de 30 jours comme celle acceptée par Kiev le 11 mars. «En évitant de contrarier la partie américaine, (Moscou) continue de rester dans ce monde magique de deux superpuissances. Et tout le monde attend», explique Ekaterina Schulmann, politologue russe basée à Berlin.
Concernant la trêve sur les infrastructures énergétiques, «les cibles explicitement interdites pendant le moratoire de 30 jours ne sont pas claires, compte tenu de la différence de langage» de part et d’autre, pointe l’Institut américain pour l’étude de la guerre (ISW). Et aucun des belligérants ne s’est privé mercredi de frapper des infrastructures ennemies.
La Russie va profiter de son avantage
Quant au cessez-le-feu général, il semble inatteignable. «Rien ne changera sur la ligne de front», assure le CSIS, un think tank de Washington. «L’artillerie continuera de tirer, les drones de voler, les infanteries de se tirer dessus et les (soldats) de mourir». L’armée russe n’a aucun intérêt objectif à s’arrêter. «La Russie va profiter de son avantage sur le champ de bataille», affirme à l’AFP Konstantin Kalatchev, politologue indépendant. «Le printemps est arrivé, tout s’est asséché et c’est la période la plus propice à l’utilisation d’équipements lourds».
Même l’agenda des conversations semble valider la mainmise de Vladimir Poutine. L’ISW note qu’il a exigé l’arrêt de l’aide étrangère à l’Ukraine. Mais sans aborder celle qu’il reçoit de Corée du Nord, de Chine et d’Iran. Et l’un des prochains dossiers pourrait être un cessez-le-feu des forces navales. Un domaine mineur du conflit, dans lequel Moscou a accumulé les pertes sans jamais obtenir le blocus maritime de la ville d’Odessa qu’il préparait au début de la guerre.
«Poutine n'a rien cédé»
Globalement, insiste Konstantin Kalatchev, «Poutine n’a cédé aucune position (...). Et Trump fait contre mauvaise fortune bon cœur, il ne peut rien faire d’autre». C’est le cas aussi de la question territoriale, absente des communiqués officiels. «Les objectifs minimalistes de la Russie comprennent le contrôle total des quatre provinces envahies —Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia — et une Ukraine démilitarisée. Ses objectifs maximalistes restent un changement de régime en Ukraine et l’élection d’un candidat président prorusse», résume le CSIS.
Kiev, pour sa part, veut récupérer tout son territoire, y compris la Crimée perdue en 2014. Mais plus personne n’y croit. Le plus inquiétant peut-être, pour Kiev et ses alliés européens, est la confirmation d’un tête-à-tête exclusif entre deux hommes soucieux de leurs seuls intérêts bilatéraux.