Genève – Crise à la prison pour mineurs, le directeur en arrêt

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GenèveCrise à la prison pour mineurs, le directeur en arrêt

Entre logiques éducative et sécuritaire, le personnel du centre de détention de La Clairière est divisé. Les violences le déstabilisent. Le directeur est malade, son adjointe en partance. 

Une cour du centre de détention de La Clairière.

Une cour du centre de détention de La Clairière.

TDG – S. Iuncker-Gomez

La prison pour mineurs de La Clairière est en crise. Son directeur Yannick Hanne est en arrêt-maladie depuis le début de la semaine passée. Sa directrice adjointe Laura Calabrese est sur le départ: elle a démissionné. Le chef des gardiens, lui, reste dans le navire, mais a aussi été en arrêt récemment. Ces événements surviennent dans un contexte troublé. Le samedi 26 février, une violente émeute avait nécessité l’engagement de la brigade d’intervention et sérieusement ébranlé le personnel, composé d’agents de détention et d’éducateurs, qui s’était senti en danger. La semaine du 7 mars, le Service d’audit interne de l’Etat s’est rendu sur place.

Ces secousses s’inscrivent dans un contexte plus large. Cet été, près de la moitié des employés de La Clairière, en conflit avec la direction, avait fait appel au Groupe de confiance de l’Etat. Cette structure indépendante réalise des médiations en cas de conflits relationnels au travail, de harcèlements ou d’atteintes à la personnalité. A l’époque, l’Office cantonal de la détention (OCD) avait confirmé qu’il existait «des différences de vues au sein du personnel quant à l’approche éducative des mineurs détenus».

Démissions et turn-over

Selon nos informations, ces divergences sont plus que jamais d’actualité. Plusieurs éducateurs ont démissionné ces derniers mois, induisant un roulement conséquent du personnel. Afin de boucher les trous, des gardiens ont été amenés à effectuer des tâches sortant de leur domaine de compétences. Parmi les agents de détention, la grogne monte. Certains, mais pas tous, souhaiteraient que les jeunes soient mieux tenus, que le cadre disciplinaire soit plus strict et surtout plus clair.

Violences et faux mineurs

La présence de mineurs non accompagnés (MNA, dont certains sont sans doute majeurs), qui n’est en soit pas nouvelle, contribuerait à compliquer la situation. Ces jeunes adultes, dont la plupart n’ont rien à perdre vu leur absence de perspectives, se montreraient bien plus violents que la population «classique» à laquelle était habitué le personnel. Celui-ci se trouve désemparé et démuni face aux débordements. Un exemple illustre son dépit. Pour infliger des sanctions excédant deux jours, la direction doit solliciter l’aval de l’OCD. Il semblerait que par gain de paix, de telles peines sont rarement infligées. Et les employés, qui ont par ailleurs le sentiment que les punitions sont distribuées à la tête du client, s’offusquent de constater que des épisodes qu’ils considèrent graves, tels que des coups ou des menaces de mort, ne sont pas remontés à la hiérarchie.

Un parallèle avec Mancy

Dans ce contexte hautement émotionnel, où les collaborateurs sont très divisés, l’UPCP (le syndicat de la gendarmerie et des agents de détention) marche à pas de loup mais est inquiète. «Nous avions déjà dit cet été à l’OCD qu’il devait se préoccuper du fonctionnement de La Clairière», rappelle son président Marc Baudat. Constatant que l’institution, vu qu’elle s’occupe de mineurs, doit faire cohabiter trois logiques, l’éducative, la sociale et la sécuritaire, il tire un parallèle avec la prison-hôpital de Curabilis, où le sécuritaire a parfois peiné à faire bon ménage avec le médical. Du point de vue organisationnel, il évoque également avec un certain fatalisme le foyer de Mancy, où un personnel démuni a peiné à s’occuper de jeunes autistes. «En réalité, on ne peut pas vraiment être formé à toutes les situations. Il n’existe pas de formation transformant en surhomme.»       

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