CoronavirusDeux cas de réinfection par le Covid-19 signalés à Genève
Testés positifs au printemps, deux patients guéris entre-temps ont à nouveau été malades. Les autorités ne sont pourtant pas encore en mesure de confirmer officiellement ces réinfections.

Image d’illustration.
KEYSTONEDeux médecins genevois travaillant dans un cabinet médical de la rive droite ont traité, fin septembre et début octobre, deux patients infectés par le Covid-19. Ils possédaient la particularité d’avoir déjà été testés positifs ce printemps. L’un d’eux notamment, un trentenaire sans problème de santé particulier, avait été testé positif fin mars. Il avait subi un nouveau test en août, négatif cette fois. Avant d’être à nouveau testé positif le 29 septembre. Les deux cas ont été remontés au service du médecin cantonal.
Porte-parole du Département de la santé, Laurent Paoliello n’est pas en mesure de confirmer l’existence de cas de réinfection à Genève: «Seul le service des maladies infectieuses des HUG, dirigé par le professeur Laurent Kaiser, est habilité à attester d’éventuels cas de ce type.» Mais il admet que ce genre de situations, pour l’instant non avérées scientifiquement, commencent à remonter aux oreilles des services cantonaux.
Preuves difficiles à réunir
Aucune n’est, pour l’heure, documentée (lire l’encadré). «Je ne suis pas au courant de cas de réinfection à Genève, indique ainsi la doctoresse Silvia Stringhini, responsable de l’unité d’épidémiologie populationnelle aux HUG. Pour l’instant, ces cas sont considérés comme très, très rares. Pour prouver une réinfection, il est nécessaire de séquencer le génome du virus et de s’assurer qu’il ne s’agit pas du même la première et la seconde fois. Même un test négatif entre les deux n’est pas suffisant, car ils ne sont pas précis à 100%.»
«On sait que ça existe»
La survenance de réinfections est néanmoins une réalité qui ne surprend pas les professionnels de la santé. «On n’a pas de chiffres mais on sait que ça existe», déclare ainsi le docteur Michel Matter, président de l’AMGe, l’association des médecins du canton de Genève. L’épidémiologiste Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale de l’Université de Genève, réagit aussi avec calme: «Qu’on ait des réinfections était attendu, mais dans des conditions bien particulières. Je pensais même qu’on en aurait davantage. À Genève, je n’ai pas eu connaissance de cas et, dans le monde, cela reste très anecdotique.»

Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale de l’Université de Genève.
C’est pour cette raison que, même si les deux cas genevois venaient à être confirmés par les HUG, ils n’inquiètent pas les scientifiques interrogés. «Je pense qu’ils ne remettent rien en cause», assure Antoine Flahault. Ils seraient trop rares pour entraver l’efficacité d’un éventuel vaccin et pour empêcher tout espoir d’immunité collective. «Si nous n’avions que 5% de cas de réinfection cet automne, cela équivaudrait à 1500 cas par jour en France: on le saurait. Si les réinfections constituaient un problème majeur, on en verrait beaucoup plus.»
L’efficacité des vaccins
La doctoresse Silvia Stringhini se montre également rassurante: «Il est clair que nous avions espéré qu’il n’y ait aucune réinfection. Nous ignorons encore beaucoup de choses: combien de temps les anticorps naturels restent efficaces, si une deuxième infection est moins grave, ou moins contagieuse, etc.» Mais cela ne remet pas en cause la possibilité d’un vaccin efficace ou d’une immunité collective. «Cela ne soulève aucun doute, car on n’a pas une masse de personnes réinfectées. Or, l’immunité naturelle est moins performante et protège nettement moins que celle acquise via un vaccin, et l’immunité collective est normalement acquise par la voie vaccinale.» Surtout, le fait que des réinfections naturelles surviennent «ne nous dit absolument rien quant à l’efficacité dans la durée d’un vaccin».
En définitive, Michel Matter voit avant tout un intérêt scientifique aux cas de réinfection. «Nous avons le souci de savoir combien de temps les gens sont protégés après une infection. Aujourd’hui, la règle admise, c’est trois mois. Le sous-groupe des patients réinfectés devra absolument être étudié: sont-ils un peu plus protégés des formes graves que les autres? Transmettent-ils moins? Ont-ils adopté des comportements à risque?» L’objectif demeurant, martèle-t-il, «de protéger les plus vulnérables».
Test PCR valable trois mois
Le 15 septembre, le docteur Manuel Schibler, infectiologue et virologue aux HUG, indiquait lors d’un point presse du Conseil d’État qu’un seul cas documenté de réinfection existait au monde (cinq si l’on en croit la revue médicale «The Lancet Infectious Diseases» dans une étude publiée le 13 octobre). Mais l’État n’a jamais exclu la possibilité des réinfections. «Une sérologie positive permet de confirmer une infection, mais ne présume pas d’une immunité conférée à l’égard du coronavirus», indiquait le 23 septembre Laurent Paoliello, porte-parole du Département de la santé. C’est pourquoi «seul un test PCR positif datant de moins de trois mois permet de surseoir à une quarantaine».