SuisseDeuxième essai pour un revenu de base universel
Rejetée en 2016 par le peuple, l’idée continue de faire son chemin. Alors que des tests sont lancés un peu partout dans le monde, une nouvelle initiative pourrait être soumise aux citoyens.

Lors de la dernière campagne de votations, les partisans s’étaient fait remarquer en déversant des milliers de pièces de cinq centimes sur la place Fédérale.
AFPLa crise du coronavirus a boosté l’idée de la création d’un revenu de base inconditionnel dans le monde entier. Début avril, le «Courrier International» y consacrait un dossier spécial, relatant les tests effectués ou planifiés à l’échelle mondiale (lire ci-dessous). En Suisse, le peuple avait été appelé à se prononcer, en 2016, sur la création d’un tel revenu, qui prévoyait que chaque résident reçoive chaque mois 2500 francs, peu importe qu’il ou elle travaille ou non. Le peuple avait dit non à 76,9%.
La «Basler Zeitung» révèle qu’une nouvelle initiative populaire va être lancée avec une récolte de signatures dès le mois de juin. Mais l’approche pour faire campagne sera cette fois différente. En 2016, le débat était philosophique. Cette fois, il sera pragmatique. Il visera à convaincre sur le réalisme du financement d’un tel revenu via une taxe sur les transactions financières et sur les gains en capital. «La fiscalité est trop orientée sur les salaires et ignore les autres sources de revenu, disent les partisans. Notre projet est finançable. Surtout, il libère les gens de la lutte quotidienne pour s’assurer un revenu et permet plus d’énergie créatrice.»
Cette nouvelle initiative crée la bisbille parmi les partisans même du revenu de base. Certains de ceux qui avaient fait campagne en 2016 ne sont, cette fois, pas convaincus. Porter le débat sur le financement ne fonctionnera pas, selon eux. «Il faut convaincre du fait que le revenu de base est un droit fondamental, non pas une simple mesure que l’on finance» comme n’importe quelle aide sociale, dit le philosophe Philip Kovce.
Le monde entier s’y met
En Finlande, pendant deux ans, 2000 personnes sans emploi ont touché un revenu de base, fixe et inconditionnel, à la place des bureaucratiques allocations-chômage. À l’issue du test, il s’est avéré que, par rapport à un panel de chômeurs qui ne le touchaient pas, ils étaient bien plus nombreux à avoir retrouvé un travail, qu’ils conservaient malgré le versement du revenu de base. «Ils ont aussi témoigné d’un plus grand bien-être, souffraient moins de dépression et de stress et avaient plus confiance en leurs capacités et envers les autres», relevait «The Economist» en mars.
L’Allemagne va pour sa part financer un test avec 10’000 personnes, tandis que des initiatives locales ont lieu aux États-Unis. L’ancien candidat aux primaires démocrates Andrew Yang, actuellement favori des sondages pour la mairie de New York, a fait du revenu de base un point central de son programme. En Corée du Sud, un candidat à la prochaine présidentielle, fervent partisan, cherche à faire de l’élection une sorte de référendum sur un revenu de base. Au Togo, l’État verse, via leur téléphone portable, un revenu de base aux personnes les plus précaires. Une initiative populaire a aussi été lancée dans la ville de Zurich pour faire un test avec 500 personnes.
Partis plutôt réticents
De la même façon que des économistes de gauche comme de droite sont, qui favorables, qui opposés au revenu de base, il en va de même au niveau des clivages gauche-droite parmi les partis. Comme le relève la «Basler Zeitung», les Verts s’y disent favorables tandis que le PS est contre, craignant qu’un tel revenu n’affaiblisse l’État social, puisqu’il pourrait remplacer toutes les autres aides sociales. Le PLR dit non par peur d’une baisse de productivité, mais le PDC-Le Centre estime que la crise du coronavirus montre que le système social a des limites et que l’idée mérite d’être à nouveau débattue. L’UDC est également opposée à l’idée même.