Féminicide en FranceIl lui avait tiré dessus, puis brûlée vive: il prend perpétuité
Dans l'affaire Mounir Boutaa, le juge a suivi l'accusation et puni celui qui avait tiré sur son épouse avant de lui mettre le feu en 2021.

Les parents de Chahinez Daoud, vendredi.
AFPMounir Boutaa a été condamné vendredi à la réclusion criminelle à perpétuité pour «l’assassinat» en mai 2021 de son épouse Chahinez Daoud, brûlée vive à Mérignac, près de Bordeaux, une peine assortie d’une période de sûreté de 22 ans.
Cet homme, âgé de 48 ans aujourd’hui, avait tiré deux balles dans les cuisses de la victime, avant de l’asperger d’essence et d’y mettre le feu. La peine est conforme aux réquisitions de l’avocate générale de la cour d’assises de la Gironde, Cécile Kauffman, qui avait dénoncé un «acharnement meurtrier destiné à exterminer», ayant marqué «profondément toute notre société».
«Paranoïaque» aux «traits narcissiques», celui qui a raconté aux médecins avoir été violé enfant, sans le confirmer à la barre, avait basculé progressivement «dans une pathologie psychotique», faisant de sa conjointe «la cause de tous ses maux», selon les experts psychiatriques qui ont conclu durant l’instruction à l’altération de son discernement, ce qui aurait pu limiter la peine à 30 ans de réclusion.
La cour a écarté cette diminution de peine, comme l’avait requis l’avocate générale en raison de «la dangerosité de cette homme», de son «incapacité à se réinsérer».

Mounir Boutaa, le mari et meurtrier de Chahinez, a pris perpétuité.
AFP«Chahinez se savait condamnée»
La victime, mère de trois enfants dont deux issus d’une première union, «vivait dans la peur» et se savait condamnée, ont témoigné des amies. Son téléphone était vérifié, son compte Facebook contrôlé et ses papiers administratifs déchirés par son mari pour l’empêcher de travailler. «Il voulait tout maîtriser: la façon de s’habiller, la façon de cuisiner», a dénoncé une sœur de Chahinez Daoud.
Mais elle «n’a pas voulu être prisonnière, être un jouet, c’est pour ça qu’elle a été tuée», a dit son père, qui a souri à l’annonce du verdict pendant que sa femme sanglotait brièvement. L’ancienne épouse de Mounir Boutaa a raconté à la cour avoir subi «gifles, coups de pieds, insultes», et une emprise similaire.
Me Julien Plouton, avocat de la famille Daoud, a fait de l’accusé une «figure emblématique» des auteurs de féminicides, au «cheminement typique», passant «d’un amour surdimensionné» à la «dévalorisation» de celle qui devint «le diable en personne».
«Pardon au monde entier»
La défense a évoqué un homme «en souffrance permanente», «envahi par ses croyances» qui n’a pas pu préméditer son acte exhortant les jurés à ne pas juger «une affaire symbole» mais à «comprendre» celui qui «n’est pas le monstre décrit dans la presse». Avant que la cour se retire pour délibérer pendant près de cinq heures, l’accusé a demandé pardon «au monde entier». Il n’a pas réagi à l’annonce du verdict.
Un mois et demi avant sa mort, Chahinez Daoud avait déposé une nouvelle plainte contre celui qu’elle cherchait à quitter. Mais celle-ci fut mal enregistrée par un policier qui venait lui-même d’être condamné pour violences conjugales, parmi une série de «défaillances» pointées ultérieurement par une enquête administrative sur l’affaire, pour lesquelles la famille de la victime a engagé une procédure contre l’État. Cinq fonctionnaires ont été sanctionnés, dont le directeur de la police en Gironde et le commissaire de Mérignac en fonction à l’époque.

Une manifestante à Bordeaux, le 24 mars.
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