FranceAtteinte de méningiomes, elle poursuit Bayer, Viatris et Sandoz
En cause, le médicament Androcur, prescrit contre l'hyperpilosité et l'endométriose, et ses versions génériques, dont on ne l'aurait pas informée des effets secondaires.

Les ventes d'Androcur ont reculé de près de 90% entre 2018 et 2023.
AFPUne patiente souffrant de tumeurs au cerveau, qu’elle attribue au médicament Androcur, a réclamé, lundi, plusieurs milliers d’euros d’indemnisation aux laboratoires Bayer, Viatris et Sandoz au titre d’un possible «défaut d’information», son avocat exhortant la justice à «donner une leçon à ces puissants industriels».
Cette femme âgée de 55 ans, qui a pris pendant plus de vingt ans ce médicament prescrit contre l’hyperpilosité ou encore l’endométriose, a lancé une procédure civile devant le Tribunal de Poitiers visant ces groupes pharmaceutiques, ainsi que son médecin et son pharmacien.
«Obligations remplies», selon Bayer
En 2013, de multiples méningiomes, tumeurs non cancéreuses qui peuvent provoquer de graves handicaps neurologiques, lui sont diagnostiqués. Souffrant aujourd’hui de troubles visuels, de la mémoire et de fatigue importante, la quinquagénaire chiffre son préjudice «entre 200'000 et 300'000 euros, dont 50'000 euros de préjudice moral pour défaut d’information», a déclaré son avocat, Me Romain Sintes. «Ce sera le travail du juge de répartir (entre les parties mises en causes) les responsabilités, s’il nous donne gain de cause», a-t-il ajouté. La décision a été mise en délibéré au 2 juin.
La patiente assure ne pas avoir été prévenue des risques de l’Androcur, alors qu’un article scientifique évoquait dès 2008 un lien entre la molécule (acétate de cyprotérone) et l’apparition de méningiomes, tumeurs des membranes qui entourent le cerveau. Ce lien a été clairement établi en 2018.
Bayer a développé un argument chronologique, soulignant que la patiente n’avait pris l’Androcur que jusqu’en 2004 avant de suivre un traitement générique. «Nos obligations ont été respectées», a assuré l’avocat de Bayer. Pour Viatris, producteur d’une version générique, le risque n’a été prouvé scientifiquement qu’à partir de 2019. Avant, la modification de la notice était de la responsabilité de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
«Oui, ils ont respecté les textes, mais ils n’ont pas respecté l’esprit de la loi: faire en sorte de s’assurer d’une communication loyale»
«Oui, ils ont respecté les textes, mais ils n’ont pas respecté l’esprit de la loi: faire en sorte de s’assurer d’une communication loyale», a plaidé Me Romain Sintes, exhortant le tribunal à «faire jurisprudence pour donner une leçon à ces puissants industriels».
En 2024, l’Amavea, association de victimes, a déposé une plainte pénale à Paris contre X pour dénoncer la «faillite» des acteurs chargés de la sécurité de ce médicament. Une autre procédure devant le Tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis) vise à engager la responsabilité de l’État.
Les prescriptions d’Androcur ont reculé de près de 90% entre 2018 et 2023, selon l’ANSM. Fin novembre 2023, moins de 10'000 patientes étaient traitées avec ce médicament.