Bordeaux (F): un féminicide précédé de nombreuses alertes

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Bordeaux (F)Elle avait alerté la justice pendant des mois avant d'être tuée

Un homme de 40 ans est jugé à Bordeaux pour l'assassinat de son ex, tuée d'une cinquantaine de coups de couteau.

Photo prétexte.

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AFP

Le procès d’un homme de 40 ans, accusé d’avoir assassiné son ex-compagne qui avait alerté la justice pendant des mois sur les violences qu’elle subissait, s’est ouvert mercredi devant la cour d’assises de la Gironde. Devant le tribunal, une trentaine de personnes représentant plusieurs collectifs féministes se sont rassemblées pour réclamer la «protection des vivantes». «Pas une de plus», pouvait-on lire sur une grande banderole noire.

Le 2 juillet 2021 à Bordeaux, alertée par une voisine qui dit avoir entendu des hurlements de femme, la police retrouve le corps de Sandra P., 31 ans, baignant dans une mare de sang, dans l’appartement où elle vivait avec sa fille de quatre ans. L’autopsie relève une cinquantaine de plaies, la plupart pénétrantes, notamment au niveau du cou et du visage. Un couteau de cuisine couvert de sang est retrouvé sur les lieux.

Il s'est caché chez elle

Mickaël F. que la victime avait quitté quelques mois auparavant après une dizaine d’années de vie commune, est interpellé le jour des faits chez lui à Mérignac, dans l’agglomération, avec un taux d’alcoolémie de 1,87 g/l de sang. En garde à vue, il reconnaît avoir tué son ex-compagne mais affirme ne pas se souvenir de la scène, expliquant s’être introduit chez elle dans la nuit et s’être caché jusqu’à ce qu’elle revienne après avoir emmené leur fille à l’école.

Aux enquêteurs, il assure qu’il ne cherchait pas à la tuer, mais à lui faire avouer qu’elle aurait dénoncé à tort, selon lui, des violences physiques et psychologiques afin d’obtenir la garde de leur fille, née en 2017. «Il conteste et a toujours contesté la préméditation», a déclaré à l’AFP l’une de ses avocates, Me Elena Badescu, avant le procès qui dure jusqu’à vendredi.

«Elle a déposé plusieurs plaintes, des mains courantes, elle a saisi le juge aux affaires familiales»

Me Elsa Crozatier, avocate de la famille de la victime

Sandra P. et Mickaël F. s’étaient rencontrés en 2010 en région parisienne puis s’étaient pacsés en 2013. Un an après la naissance de leur fille, la jeune femme a commencé à se confier à des proches sur les violences qu’elle subissait. «Elle a déposé plusieurs plaintes, des mains courantes, (...) elle a saisi le juge aux affaires familiales. Elle a même écrit au président de la République et au procureur en les exhortant à faire quelque chose, disant qu’elle allait finir "comme ces femmes qui sont tuées par leur mari"», souligne Me Elsa Crozatier, qui représente la famille de la victime.

L’avocate a engagé parallèlement à Paris, au nom des proches, une procédure en responsabilité contre l’État. «La vraie question qui se pose, c’est pourquoi on n’agit pas? Pourquoi on tolère que des femmes se fassent battre, se fassent harceler, se fassent tuer chez elles, en France, au 21e siècle?», s’émeut Naïma Charaï, administratrice à la Fédération nationale Solidarité Femmes, réseau d’associations qui gère notamment les centres d’hébergement pour les victimes de violences conjugales.

(afp/jw)

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