La Fondation Abbé-Pierre annonce vouloir changer de nom

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FranceLa Fondation Abbé-Pierre annonce vouloir changer de nom

De nouvelles accusations de violences sexuelles ont été portées contre le prêtre. La Fondation veut s'en distancier, «par respect pour les victimes».

Ce logo, ainsi que le nom de la Fondation Abbé-Pierre, sont appelés à disparaître prochainement.

Ce logo, ainsi que le nom de la Fondation Abbé-Pierre, sont appelés à disparaître prochainement.

AFP

Baisers imposés, fellations forcées, propos à caractère sexuel: sept semaines après l’onde de choc provoquée par de premières révélations, l’Abbé Pierre est visé par une nouvelle salve d’accusations de violences sexuelles dans un rapport rendu public vendredi.

À la suite de ces nouveaux témoignages, dont certains portent sur des faits pouvant s’apparenter à des viols ou concernent des mineures, la Fondation Abbé-Pierre a annoncé sa décision de changer de nom.

Emmaüs a en outre fait savoir que le lieu de mémoire dédié au prêtre situé à Esteville, dans le nord du pays, serait définitivement fermé.

Au moins 17 victimes de plus

«A ce jour, il est possible d’identifier au moins 17 personnes supplémentaires ayant subi des violences» de la part de l’Abbé Pierre, décédé en 2007, peut-on lire dans le rapport du cabinet spécialisé Egaé, chargé en juillet par les deux organisations de recueillir de potentiels nouveaux témoignages.

Ceux-ci font état, dans leur grande majorité, de contacts «non sollicités sur les seins», de «baisers forcés», mais également de «contacts sexuels répétés sur une personne vulnérable», d'«actes répétés de pénétration sexuelle» ou encore de «contacts sexuels sur une enfant».

Dans un communiqué commun publié vendredi, la Fondation Abbé-Pierre, Emmaüs France et Emmaüs International réaffirment leur «soutien total aux victimes», saluent «leur courage» et assurent être «à leurs côtés».

Outre le changement de nom de la Fondation Abbé-Pierre et la fermeture définitive du lieu de mémoire d’Esteville, la mention «fondateur Abbé Pierre» pourrait être prochainement supprimée du logo d’Emmaüs France.

Un «malaise profond si rien ne change»

Une commission indépendante chargée «d’expliquer les dysfonctionnements qui ont permis à l’Abbé Pierre d’agir comme il l’a fait pendant plus de 50 ans» va également être désignée.

L’Abbé Pierre «a porté une voix, un élan, qui ont entraîné des vagues de solidarité, l’importance de son action constitue un fait historique», mais «nous sommes désormais confrontés à la douleur insupportable qu’il a fait subir», écrivent les organisations.

«Nos décisions sont donc impératives par respect pour les victimes qui ont pris la parole mais aussi pour les bénévoles, les salariés, les compagnes et les compagnons du Mouvement, les soutiens et les donateurs, dont l’action au quotidien serait entachée d’un malaise profond si rien ne changeait», ajoutent-elles.

Mis en place en juillet, le dispositif d’écoute et d’accompagnement restera quant à lui «ouvert et disponible jusqu’à la fin de l’année».

Certains faits remontent aux années 1950

Les faits dénoncés remontent à une période des années 1950 aux années 2000, la plupart du temps en France mais également aux Etats-Unis, au Maroc ou encore en Suisse.

Les personnes qui ont témoigné sont, ou ont été, bénévoles d’Emmaüs, salariées de lieux dans lesquels a séjourné l’Abbé Pierre, membres de familles proches du prêtre ou encore des personnes rencontrées lors d’événements publics, précise Egaé.

Parmi les témoignages, celui d’une femme ayant adressé une lettre à la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase), dans laquelle elle dit avoir «dû assister à des masturbations de l’Abbé Pierre et avoir été forcée à réaliser des fellations dans un appartement parisien» en 1989.

La famille d’une autre, décédée aujourd’hui, rapporte qu’elle avait été «forcée de masturber» l’Abbé Pierre à Rabat, au Maroc, en 1956.

Petite victime de 8 ou 9 ans

Une autre femme témoigne avoir subi, en 1974 et 1975 en Ile-de-France, des «baisers forcés» et «des contacts» non sollicités alors qu’elle avait 8 à 9 ans. Selon un autre témoignage, l’Abbé Pierre aurait également imposé, en 1951, des contacts physiques non sollicités lorsqu’il était député à l’Assemblée nationale.

«Certaines parlaient pour la première fois de ce qui leur était arrivé et revivaient les faits en même temps qu’elles les racontaient», a déclaré à l’AFP Caroline De Haas, directrice associée d’Egaé.

Déclenchée le 17 juillet, la première vague de témoignages visant l’Abbé Pierre, icône et défenseur inlassable des sans-abri et des mal-logés, a provoqué une onde de choc en France.

L'«effroi» de la Conférence des évêques

La Conférence des évêques de France (CEF), qui avait déjà dit sa «douleur» et sa «honte» après les premières révélations, a exprimé vendredi son «effroi» et promis de coopérer avec Emmaüs. Les nouveaux témoignages sont «extrêmement graves», «faisant état en particulier d’agressions sexuelles sur des jeunes filles mineures», a ajouté la CEF dans un communiqué.

Les premières accusations ont soulevé des interrogations sur la connaissance qu’en avaient ces institutions. «Le rapport indique que des personnes ont pu être informées à titre individuel mais pas en tant que mouvement», affirmait début août le délégué général d’Emmaüs International Adrien Chaboche à «La Vie».

(afp)

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