Sarkozy et Kadhafi: un «pacte de corruption indécent» dénoncé

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FranceUn «pacte de corruption indécent» noué par Sarkozy et Kadhafi

Le Parquet financier a commencé à requérir mardi après-midi, et pour deux jours et demi, contre Nicolas Sarkozy et onze autres prévenus, dont trois ex-ministres.

Nicolas Sarkozy affirme n'avoir «pas touché un centime».
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Nicolas Sarkozy affirme n'avoir «pas touché un centime».

AFP

Le Parquet financier a fustigé mardi, en commençant ses réquisitions, le «pacte de corruption inconcevable, inouï, indécent» noué selon lui en 2005 par Nicolas Sarkozy et ses proches avec le dictateur libyen Mouammar Kadhafi.

Un pacte qualifié ainsi car «conclu avec (un) régime sanguinaire» et ayant eu «pour objectif de soutenir financièrement la campagne» de «celui qui deviendra le 6e président de la Ve République». Mais aussi car «il aurait pu vicier le résultat» de l’élection présidentielle 2007 et qu’il «risquait de porter atteinte à la souveraineté et aux intérêts de la France».

«Derrière l’image de l’homme public, du ministre d’État, du président de la République, se dessine au gré des enquêtes judiciaires la silhouette d’un homme porté par une ambition personnelle dévorante, prêt à sacrifier sur l’autel du pouvoir les valeurs essentielles telles que la probité, l’honnêteté et la droiture», a déclaré le procureur Quentin Dandoy au sujet de Nicolas Sarkozy, dont c’est le cinquième procès en cinq ans.

Dix ans de prison et 375'000 euros d’amende

L’ancien président, 70 ans, s’est assis sur l’une des chaises destinées aux prévenus. Il est soupçonné d’avoir noué fin 2005, avec l’aide de ses proches Brice Hortefeux et Claude Guéant, un «pacte de corruption» avec le richissime dictateur libyen Mouammar Kadhafi, afin qu’il soutienne financièrement sa campagne présidentielle victorieuse de 2007.

Jugé pour corruption, recel de détournement de fonds publics, financement illégal de campagne et association de malfaiteurs, Nicolas Sarkozy encourt 10 ans de prison et 375'000 euros d’amende (357'000 francs), ainsi qu’une privation des droits civiques (donc une inéligibilité) allant jusqu’à 5 ans.

Au vu de la gravité des faits reprochés et de la peine encourue, se posera la question de savoir si l’accusation réclame un mandat de dépôt – une incarcération immédiate, même en cas d’appel – à l’encontre de l’ancien président.

Atteintes à la probité

Mardi matin, les avocates de l’État libyen, bien éloigné de celui que dirigeait Mouammar Kadhafi jusqu’à sa mort en 2011, ont demandé que les prévenus soient condamnés à verser 10 millions d’euros (9,5 millions de francs) en dommages et intérêts. «L’impact est bien plus grave que juste la somme allouée», a plaidé Me Marion Seranne. «Les atteintes à la probité constituent la pierre angulaire d’une démocratie et ces atteintes, dans un pays en construction, sont d’une particulière gravité», a-t-elle déclaré.

L’ex-homme fort de la droite a de nouveau juré mercredi lors d’un dernier tour de questions ne pas avoir «touché un seul centime d’argent illégal, libyen ou autre». «J’ai eu l’impression qu’on était parti du postulat "Sarkozy coupable"», que «l’enjeu» n’était plus la «recherche de la vérité» mais pour le Parquet financier de «ne pas perdre la face», a affirmé l’ex-chef de l’État.

Deux condamnations

Parmi les prévenus figurent l’ancien ministre Eric Woerth (68 ans), poursuivi en tant que trésorier de la campagne; l’ancien ami de Nicolas Sarkozy, Thierry Gaubert (73 ans), récipiendaire de 440'000 euros (419'000 francs) suspects; deux hommes d’affaires saoudiens, un banquier franco-djiboutien et un ancien cadre d’Airbus.

Définitivement condamné en décembre pour corruption et trafic d’influence à un an de prison ferme aménagé dans l’affaire des écoutes, Nicolas Sarkozy porte depuis le 7 février un bracelet électronique. Il a par ailleurs été condamné en appel à un an de prison, dont six mois ferme, dans l’affaire Bygmalion, pour des dépenses excessives de campagne en 2012. Il a formé un recours devant la Cour de cassation.

(afp/mc)

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