GenèveChantier de l'énergie: «D'immenses trous dans les rues»
D'ici à 2030, les Services industriels vont enterrer près de 100 kilomètres d'énormes tuyaux dans les zones denses, les «autoroutes du chaud et du froid».

Durant cinq ans, la Ville de Genève sera éventrée pour accueillir d'immenses conduites, telles que celles installées ici par les SIG en 2023 à Meyrin, dans le cadre du chantier GeniLac.
TG - L. GUIRAUDAlerte aux chantiers! Dès 2025 et pour cinq ans, le centre-ville de Genève sera éventré de partout, tout comme les zones densément peuplées du canton. Y seront enterrés près de 100 kilomètres d’énormes tuyaux: les «autoroutes du chaud et du froid», comme les a appelées mercredi le conseiller d'Etat Antonio Hodgers, ou réseaux thermiques structurants, de leur nom barbare. C'est qu'il s'agit d'alimenter, d’ici à 2030, 1700 bâtiments en énergie à 80% non fossile, soit issue de la récupération de chaleur, de la géothermie, de l’eau du lac, des stations d’épuration ou encore de la biomasse.
Le gros défi: informer les gens
«Il faudra faire d’immenses trous dans les rues puis les reboucher. C’est un défi invraisemblable», a averti mercredi Robert Cramer, le président des Services industriels (SIG). Le nerf de la guerre, selon lui, sera l'information à la population. «Il faudra expliquer qu'il y aura un chantier, combien de temps il va durer, que l'on travaille pour les gens et pas pour les enquiquiner. Un numéro répondra en tout temps à leurs demandes. Si un ouvrier vient faire du bruit sous vos fenêtres à 7h du matin, puis que vous ne voyez plus personne durant deux semaines, ça ne va pas. Ça ne peut pas continuer comme ça!»
En profiter pour faire plusieurs chantiers en un
L'autre enjeu majeur sera la coordination: l'Etat et les SIG, qui ont aussi travaillé en amont avec la Ville de Genève, souhaitent profiter de l'occasion pour mener plusieurs chantiers de front. Bref, quitte à embêter les habitants, autant ne le faire qu'une seule fois. «C'est un sacré plan, a exposé Robert Cramer. Quand on va toucher une rue, on va la toucher beaucoup», histoire de tout régler d'un coup: aménagement de pistes cyclables, plantations d'arbres, pose de revêtements phonoabsorbants. «Il y aura ces prochaines années plus de chantiers en ville qu'aujourd'hui», a prévenu Antonio Hodgers; mais, point positif, «peut-être moins de petits chantiers», a complété Robert Cramer.
Objectif neutralité carbone
Cet immense chantier s'inscrit dans la volonté de l'Etat de Genève de réduire de 60% ses émissions de gaz à effet de serre en 2030, et de parvenir à la neutralité carbone en 2050. A cette date-là, l'objectif est que la moitié de la demande thermique du canton soit assurée avec de l'énergie 100% renouvelable. Ceci impliquera de raccorder 7000 bâtiments aux «autoroutes du chaud et du froid». Car le chauffage des bâtiments et la production d'eau chaude représentent plus de 50% de la consommation énergétique genevoise – et qu'à ce jour, ces tâches dépendent encore à 90% du mazout et du gaz.
«Souveraineté énergétique»
Le Conseil d'Etat a validé ce mercredi les tarifs de l'énergie fournie via les réseaux thermiques structurants (pour lesquels les SIG auront investi 1,5 milliard de francs d'ici à 2030). Le prix moyen sera de 18 centimes par kilowattheure pour GeniTerre et 22 centimes pour GeniLac chaud et froid, un tarif similaire à ceux pratiqués ailleurs en Suisse, ont indiqué les SIG. «Notre but, c'est d'avoir le prix le plus bas possible, car à côté, il y a le mazout et le gaz, a résumé Robert Cramer. Et nous garantissons sa stabilité.» C'est essentiel, souligne Antonio Hodgers, qui rappelle l'explosion des prix du gaz quand la guerre en Ukraine a éclaté. «Ce projet nous offre la souveraineté énergétique.»