GenèveDes champs à l'assiette, le parcours initiatique de citadins
L'Université a ouvert des ateliers pratiques d'agroécologie, destinés aux néophytes. En creux, la démarche questionne notre mode de consommation. AgriGenève apprécie, mais émet une réserve.
«J'ai acheté une maison et créé un potager... Bon, ce n'est pas franchement une réussite, sourit Célia. J'ai donc eu envie d'apprendre, via ces ateliers qui correspondent à mes valeurs en matière de développement durable.» Comme une vingtaine d'autres personnes, cette fonctionnaire à l'Etat s'est lancée dans une initiation à l'agroécologie proposée pour la première fois par l'Université de Genève (UNIGE), depuis fin septembre.
Pour un prix global de 40 francs pour les étudiants à 80 fr. pour des personnes extérieures à l'UNIGE, six modules offrent conseils et techniques liés à l'arboriculture, la viticulture ou encore le maraîchage. Ils sont conduits par des producteurs du canton, au sein de leur exploitation. Lauréat du programme académique U Change, le projet émane d'étudiants en master à l'Institut des sciences de l'environnement.
Principe de durabilité
La protection de l'environnement et l'urgence climatique suscitent un intérêt croissant de la population dans son rapport à la terre, d'où cette offre, explique Zsolt Maurer, cocréateur des ateliers. «Il y a un effet de mode et un côté militant, c'est vrai. Les participants sont impliqués, ils partagent un lien fort avec la nature et surtout, ils s'interrogent sur leur consommation.»
L'agroécologie vante ainsi les vertus d'un approvisionnement durable, saisonnier, en circuit court. La production s'y fait sans produit chimique, avec un emploi limité de tracteurs et autres moissonneuses-batteuses à essence, afin de réduire l'empreinte carbone. Le tout dans des exploitations «à taille humaine», à la gouvernance souvent collective.
En mode militant, mais pas que
Dans ce cadre là, «on offre une formation pratique et accessible à des amateurs qui ont envie de mettre la main à la terre mais qui souvent ne savent pas ce que cela signifie vraiment», complète Nina Michael, autre tête pensante du projet.
Éducatif, l'objectif n'est pas de vendre du rêve, rebondit Zsolt Maurer. «On donne des pistes aux participants, sans leur cacher que travailler la terre comporte bien des difficultés - financières ou organisationnelles, notamment. C'est aussi dur, physiquement», éclaire ce fils d'agriculteur. Lequel tient à rester humble: «Nous voulons susciter une réflexion, pour opérer des choix en matière de consommation. Mais on ne prétend pas détenir la vérité.»
AgriGenève: un bravo et un bémol
La faîtière des agriculteurs jette un regard plutôt bienveillant sur ces ateliers. «Ils visent à faire découvrir - notamment à des amateurs urbains et engagés - un modèle particulier d'agriculture, qui constitue une offre complémentaire; en ce sens, cette initiative est bénéfique», apprécie Héloïse Candolfi, directrice d'AgriGenève. Minoritaire, l'agroécologie est cependant valorisée depuis plusieurs années par les autorités. Selon la responsable, il y a là une limite à ne pas dépasser: «Ce mode d'exploitations ne peut pas constituer un objectif prioritaire; son rendement reste faible, alors que l'on doit maintenir le taux actuel d'auto-approvisionnement pour nourrir la population.»