GenèvePincé pour usage détourné de médicaments
Les produits pharmaceutiques tels que la Prégabaline, le Rivotril et le Sevre-Long sont consommés par les toxicomanes. Tour d'horizon.

Certains médicaments sont détournés de leur usage et utilisés comme drogue.
AFPL'amende s'élève à 500 francs. Par ordonnance pénale datée du 1er février, un homme âgé de 35 ans a été reconnu coupable d'infraction à la loi sur les stupéfiants à Genève. Dans ses poches: deux pilules de Sevre-Long, un médicament détenu sans ordonnance. Depuis le début de l'année, ce n'est pas le seul prévenu à avoir écopé d'une condamnation pour détention de produits pharmaceutiques. Un autre a par exemple été condamné alors qu'il avait en sa possession de la Prégabaline. Tandis qu'un troisième disposait de Rivotril.
«L'usage et le trafic de ce type de médicaments sont fréquents dans le milieu des toxicomanes déjà bien ancrés dans leur consommation», précise la lieutenante Aline Dard, porte-parole de la police genevoise. En général, la consommation de ces substances se fait en plus d'autres drogues (opioïdes, crack, etc). «Elles font également très fréquemment l'objet de trafic, notamment pour financer l'acquisition d'autres produits stupéfiants. Il n'est donc pas rare d'en saisir», poursuit-elle. Selon l'usage genevois, en cas de possession de ces substances sans droits, c'est la loi sur les stupéfiants qui s'applique. «La réponse pénale dépend des circonstances et de l'importance de la saisie.»
Le Sevre-Long prescrit sous ordonnance souche
Le professeur Daniele Zullino, médecin responsable du service d’addictologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) connait bien la problématique. «Durant des années, notre souci, c'était le Dormicum, un somnifère puissant et rapide. Depuis, d'autres produits ont pris le relais, parmi lesquels le Sevre-Long, le Rivotril et la Prégabaline. On les retrouve dans le cadre de multiconsommation.» A noter que ces trois produits n'ont pas les mêmes effets (lire l'encadré) et ne sont pas tous soumis aux mêmes réglementations.
Ainsi, si la Prégabaline et le Rivotril sont prescrits sur la base d'une ordonnance normale, le Sevre-Long nécessite, lui, une ordonnance à souche. «Il constitue un traitement de substitution oral en cas de dépendance aux opioïdes dans le cadre d'une prise en charge médicale, sociale et psychologique», indique le service de la pharmacienne cantonale. «Aux HUG, 200 patients sont sous Sevre-Long. Ils viennent chaque jour chercher leur dose», précise Daniele Zullino. Et ce, afin de réduire les risques de dépendance et d'assurer le suivi.
Les risques du Fentanyl et du Carfentanil
Selon la pharmacienne cantonale, les pharmacies genevoises n'ont pas relevé d'éléments marquants montrant que ces médicaments sont utilisés de manière détournée de leur usage de base. Reste qu'ils sont accessibles sur le marché noir. «Même si on ne peut être favorable à ce phénomène, il s'avère moins dangereux pour une personne dépendante aux opiacés de consommer ces produits pharmaceutiques», poursuit Daniele Zullino. Et de faire part de son inquiétude face aux risques inhérents à la consommation de drogues particulièrement puissantes telles que le Fentanyl et le Carfentanil, qui est «10'000 fois plus puissant que la morphine».
Contre les angoisses et l'épilepsie
La Prégabaline est normalement prescrite en cas de douleurs neuropathiques, d'épilepsie ou de troubles anxieux généralisés. «Elle rend la vie plus agréable et permet d'oublier. On l'a retrouvée rapidement sur le marché noir. Elle induit une dépendance, détaille Daniele Zullino. On a assisté à sa propagation au sein de la population migrante d'Afrique du Nord.»
Le Rivotril est une benzodiazépine prescrite pour un traitement de 6 mois maximum. C'est un anti-épileptique. Il peut également être utilisé pour lutter contre les angoisses. «C'est un anxiolytique assez efficace, rapide et relaxant», souligne le professeur. Il est utilisé à des fins récréatives, «associé à la cocaïne pour en contrebalancer les effets ou à l'héroïne pour les renforcer».