Haute-Savoie/Isère (F)Aigle abattu: «C'est un jugement qui va faire date!»
Relâché près de Genève, le pygargue à queue blanche avait été tué par un chasseur le 24 février en Isère. Considérant qu'il s'agit d'un «acte criminel grave», le Tribunal l'a lourdement condamné.

L'oiseau abattu avait été relâché.
20min/Vanessa Lam«C'est incroyable. Je pense que c'est un jugement qui va faire date.» Jacques-Olivier Travers, qui dirige le programme de réintroduction du pygargue à queue blanche mené par les Aigles du Léman, n'en revient pas. Le Tribunal de Grenoble (Isère) a rendu mercredi en début d'après-midi son délibéré à l'encontre du chasseur qui a abattu un aigle le 24 février à La Salette (F), en Isère. La juge a d'emblée précisé que «le fait de tuer une espèce protégée ne peut être considéré que comme un acte criminel grave.»
Quatre mois avec sursis et 60'000 euros à payer
Partant de ce principe, elle a légitimé la procédure exceptionnelle qui avait été mise en œuvre pour retrouver la trace de l'auteur du tir. Ce dernier, un Isérois de 35 ans, a été reconnu coupable d'avoir «détruit un grand rapace et porté atteinte à la protection de cette espèce». Il écope de 4 mois de prison avec sursis et devra verser au total environ 60'000 euros aux associations qui s'étaient portées partie civile.
La Ligue de protection des oiseaux devrait ainsi toucher 30'000 euros. S'ajoute, au bénéfice des Aigles du Léman: 15'800 euros pour la perte de l'oiseau (qui avait été relâché le 4 septembre 2023 à Sciez, en Haute-Savoie) et 2000 euros pour le préjudice moral. Le trentenaire est aussi interdit de chasse et de détenir des armes pour une durée de 3 ans. Son avocat, Me Bernard Boulloud a indiqué qu'il pourrait faire appel contre les condamnations sur intérêts civils, celles qui bénéficient aux associations. Il a contesté la motivation du Tribunal, arguant du fait que «la Cour de Justice de l’Union Européenne assimile la criminalité grave à la criminalité organisée notamment en matière de stupéfiants ou de terrorisme».
De son côté, le demi-frère du tireur, âgé de 30 ans, qui était présent sur les lieux, n'a pas été reconnu coupable de complicité. En revanche, en raison d'infractions à la chasse, il est lui aussi interdit d'exercer cette activité durant 3 ans et privé de ses armes.
Un autre procès fin août
Enfin, le Tribunal a retenu la proposition faite par Jacques-Olivier Travers de publier le jugement dans toutes les revues de chasse. «Ce qui nous importe le plus, c'est le message: aujourd'hui, les gens qui tirent ou empoisonnent des espèces protégées ne peuvent plus agir en toute impunité. Grâce aux balises, on retrouve les auteurs et ils payent cher.»
Et de citer l'exemple d'un individu dans les Ardennes qui passera en procès le 30 août. «Cela faisait dix ans que les gardes de l'office français de la biodiversité le suspectaient d'empoisonner des oiseaux. Dernièrement, il s'en est pris à un pygargue qui était bagué. Ce qui a permis de le retrouver», conclut le fauconnier.

Le pygargue abattu en février à La Salette (Isère) avait été retrouvé grâce à la balise.
DR