JuraUn aveugle dégoûté d'avoir été abandonné par les CFF
Un sexagénaire n'a pas pu compter sur l'aide des CFF pour changer de train à la gare de Glovelier, dimanche. La compagnie se défend en évoquant la loi.
Jean devait se déplacer de la voie 2 à la voie 13.
Wikipedia/Chrisaliv/dbrDimanche dernier, Jean*, un sexagénaire jurassien, devait se rendre en train à La Ferrière depuis Delémont, en changeant de train à la gare de Glovelier, pour passer de la voie 2 à la voie 13. Seulement, Jean est aveugle et a besoin d'aide pour les correspondances. Prévoyant, il a appelé samedi soir le service «aide en gare» des CFF, qui met du personnel à disposition des personnes à mobilité réduite, pour organiser la prestation du lendemain. Mais stupeur: voilà qu'à l'autre bout du fil, on lui a répondu que ce ne serait pas possible. On lui aurait indiqué que la gare de Glovelier est trop petite: «On ne dessert pas là-bas.»
À disposition... mais pas pour tout le monde
C'est que la loi fédérale sur l'égalité pour les handicapés (LHand) est sujette à interprétation. Elle prévoit que les personnes en situation de handicap «doivent pouvoir utiliser les prestations des transports publics sans discrimination et se déplacer avec la plus grande autonomie possible». Une personne en chaise roulante qui se trouve physiquement dans l'impossibilité de monter toute seule dans un train peut par exemple bénéficier du personnel spécialisé des CFF dans toutes les gares, Glovelier incluse, assure l'entreprise.
Mais les choses sont différentes pour les personnes aveugles et malvoyantes, au grand dam de Jean. Selon la compagnie, ces usagers se trouvent certes dans l'embarras pour changer de train, «mais pas forcément dans l'impossibilité de le faire». Et en l'absence d'obstacle concret, l'entreprise prétend ne pas être légalement contrainte à apporter son assistance. Une affirmation balayée d'emblée par le Vaudois Nouh Latoui, lui-même en chaise roulante et qui milite pour la défense des personnes en situation de handicap: «C'est une discrimination de la part des CFF. Toute personne en situation de handicap a besoin d'aide.»
*Prénom d'emprunt
Organisations bénévoles
«Actuellement, il y a quatorze gares où les personnes aveugles et malvoyantes peuvent demander une aide au changement de train. Et même là, le service n'est pas garanti, car la mise en relation par le Call Center ne fonctionne pas toujours», déplore Martin Abele, porte-parole de la Fédération suisse des aveugles et malvoyants. Il souligne tout de même que des alternatives existent avec des organisations bénévoles, à l'instar des Transports publics lausannois, qui bénéficient du soutien de la Croix-Rouge. Et à Frauenfeld (TG), ce sont les chauffeurs de taxi qui sont mis à contribution pour aider les personnes en difficulté à rejoindre le bon quai.