Agriculture en SuisseLa formation «express» suscite la controverse
Les cours de reconversion à l'agriculture connaissent un succès grandissant. Les conditions d'admission seront toutefois plus strictes dès le 1er janvier.

Si 201 personnes ont suivi cette formation complémentaire en 2008, les futurs paysans et paysannes étaient 322 à s'inscrire en 2014.
A l'origine de ce durcissement, la controverse sur les paiements directs. La formation complémentaire pour l'agriculture permet en effet de toucher ces subventions au même titre que le diplôme fédéral. A la différence de l'apprentissage de trois ans, le cours peut toutefois être suivi en parallèle à l'emploi régulier et ne dure qu'un an.
Un agriculteur sur cinq sollicitant des paiements directs n'a suivi «que» ce cours. Cette formation «express» n'est pas bien vue au sein même de la paysannerie: seules les personnes bénéficiant d'une formation solide devraient recevoir des paiements directs, a exigé le lobby agricole dans le cadre des négociations sur la Politique agricole 2014-2017.
Critères plus stricts
Le Parlement n'a pas écouté les paysans sur ce point. La nouvelle Politique agricole prévoit toujours des subventions fédérales pour les personnes ayant achevé une formation complémentaire. Le règlement a toutefois été revu: dès le 1er janvier, les huit écoles agricoles proposant ces cours appliqueront des critères unifiés et plus stricts.
L'âge minimum d'admission aux examens a ainsi été relevé de 25 à 28 ans. L'examen final prévoit désormais, outre la partie écrite, une heure d'entretien spécialisé dans une exploitation.
Martin Schmutz, de la division formation de l'Union suisse des paysans (USP), espère que la hausse de l'âge minimal pour les cours complémentaires incitera les jeunes à opter pour l'apprentissage de trois ans. Le certificat fédéral de capacité leur donne une formation de base plus solide, au cas où ils reprendraient une exploitation à plein temps. De même, des formations post-grade ne sont possibles qu'avec cette voie, explique-t-il à l'ats.
Frein à l'engouement
Pour Martin Schmutz, les conditions plus strictes devraient freiner l'engouement pour la formation complémentaire pour l'agriculture. Le canton de Berne ne prévoit d'ailleurs que trois cours au lieu de quatre en 2015.
Markus von Gunten, directeur d'Inforama Emmental, le centre de formation, conseil et de congrès pour l'agriculture et l'économie ménagère rurale du canton de Berne, estime lui que l'intérêt pour la formation complémentaire restera élevée à moyen terme: «Beaucoup de gens réfléchissent à nouveau davantage au sens de leur vie et concluent que l'argent et la carrière ne sont pas tout. Ces personnes se sentent attirées par l'agriculture».
Lien au monde paysan
Celles qui n'ont jamais eu de lien avec le monde agricole se retrouvent parfois débordées - les cas ne sont pas rares - ou peinent à trouver une ferme adéquate et abordable. Ces novices ne constituent toutefois qu'une minorité: «Près de 90% des participants aux cours ont grandi dans une ferme», explique Markus von Gunten. La plupart ont fait un apprentissage, par exemple maçon, menuisier ou mécanicien agricole.
Le participant type à la formation complémentaire pour l'agriculture ne se décide souvent qu'après avoir eu trente ans à reprendre l'exploitation parentale. Pour beaucoup, un apprentissage de trois ans n'est alors plus envisageable, par exemple lorsqu'ils ont une famille à nourrir.
Pour les régions de montagne à faible densité de population, il est important de continuer à offrir la formation complémentaire, estime Markus von Gunten. Y compris la possibilité de toucher des paiements directs. (ats)