Cour européenne des droits de l’homme: Le combat acharné d’un couple gay pour son fils: la Suisse condamnée

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Cour européenne des droits de l’hommeLe combat acharné d’un couple gay pour son fils: la Suisse condamnée

La Cour européenne a condamné la Suisse pour avoir privé un enfant, pendant près de huit ans, de toute possibilité de lien de filiation avec son deuxième père. 

La Suisse a été condamnée par la CEDH pour avoir trop tardé à reconnaître l’adoption d’un enfant né par gestation pour autrui en 2011.

La Suisse a été condamnée par la CEDH pour avoir trop tardé à reconnaître l’adoption d’un enfant né par gestation pour autrui en 2011.

afp

Douze ans de bataille judiciaire! Une affaire d’adoption d’un enfant né par gestation pour autrui vient de connaître son épilogue ce mardi avec la publication d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

En 2010, un couple gay basé à Saint-Gall avait trouvé une mère porteuse en Californie. En 2011, les deux hommes sont rentrés en Suisse avec un nourrisson de sexe masculin et une reconnaissance officielle d’un tribunal californien  que les deux hommes étaient les parents du garçon. Mais le canton de Saint-Gall a refusé la transcription du certificat américain dans le registre de l’état civil. 

Ballet judiciaire

En 2013, soit deux ans après la naissance de l’enfant, Saint-Gall a admis l’inscription à l’état civil des deux hommes en tant que pères de l’enfant.  L’Office fédéral de la justice (OFJ) a formé un recours, rejeté par le Tribunal administratif cantonal, qui a estimé que même si la gestation pour autrui (GPA) était interdite, l’enfant ne devait pas en subir les conséquences. L’OFJ a alors saisi le Tribunal fédéral qui a admis le recours en 2015. Pour Mon-Repos, l’interdiction de la GPA induisait automatiquement le refus de tout lien de filiation non génétique afin de ne pas violer l’ordre public suisse de l’époque. 

Le couple saint-gallois a alors saisi la Cour européenne des droits de l’homme, qui vient de rendre son verdict. Ce mardi, les juges ont décidé, par six voix contre une, qu’il y avait eu «violation du droit au respect de la vie privée» de l’enfant.

La Cour distingue la situation de l’enfant de celle des parents d’intention. Elle considère que chaque fois que la situation d’un enfant est en cause, l’intérêt supérieur de celui-ci doit primer.

Cour européenne des droits de l’homme

La Cour a notamment décrié le fait que l’enfant n’ait eu aucune possibilité de lien de filiation de manière définitive durant 7 ans et 8 mois. «La Cour distingue clairement la situation de l’enfant de celle des parents d’intention. Elle a mis en exergue le droit de l’enfant né à son identité. Elle considère que chaque fois que la situation d’un enfant est en cause, l’intérêt supérieur de celui-ci doit primer.» Les juges de Strasbourg ont condamné la Suisse à verser à l’enfant, dans un délai de trois mois, environ 15’000 fr pour dommage moral et 20’000 francs pour ses frais de défense. En revanche, les juges de la Cour ont rejeté à l’unanimité le recours des deux hommes. Ils ont ainsi validé l’avis du Tribunal fédéral: la gestation pour autrui à laquelle le couple a recouru en Californie était contraire à l’ordre public suisse.

«Mettre fin à la situation de précarité des enfants»

«Cet arrêt était attendu depuis 2015. Je ne suis pas du tout surprise par cette décision de la CEDH qui constate une violation du droit au respect de la vie privée de l’enfant en raison du refus par la Suisse de reconnaître le lien de filiation entre l’enfant et l’un de ses pères pendant presque 7 ans et 8 mois», a déclaré l’avocate Me Tiffaine Stegmüller. Cette experte qui publie des articles juridiques et scientifiques portant sur la procréation médicalement assistée a également réagi sur LinkedIn. «L’arrêt de la CEDH est très clair: les décisions d’adoption pour les enfants nés par GPA doivent se faire de manière effective et rapide.» Selon l’avocate lausannoise, la jurisprudence de Strasbourg oblige la Suisse à accélérer les procédures d’adoption. «Cette accélération est une bonne chose pour les enfants qui, entre-temps, sont dans une situation de précarité à tous les niveaux.» 

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