ÉconomieLe Liban fait face à une «catastrophe»
Mercredi, le premier ministre libanais s'est exprimé sur les défis que doit relever son pays.

Hassan Diab est le nouveau premier ministre libanais.
KeystoneLe nouveau premier ministre libanais Hassan Diab a averti mercredi que son pays, au bord de la faillite, faisait face à une «catastrophe». Il a promis de répondre aux «défis immenses» qui attendent son gouvernement, confronté à une contestation sans précédent.
Après une nuit émaillée de violences dans plusieurs villes, cet universitaire de 61 ans a tenu mercredi une première réunion de son gouvernement formé la veille. Le chef du gouvernement avait promis de répondre aux revendications de la rue en nommant un gouvernement de «technocrates indépendants». Mais pour les manifestants, mobilisés depuis le 17 octobre, les ministres restent des personnalités affiliées à la classe politique tant conspuée.
«Impasse»
«Nous sommes face à une impasse financière, économique et sociale», a reconnu le premier ministre, selon une déclaration lue par un haut fonctionnaire à l'issue du Conseil des ministres. «En réalité nous sommes face à une catastrophe et nous devons alléger l'impact et les répercussions de cette catastrophe sur les Libanais.»
«Les défis sont immenses» et «les Libanais sont fatigués des promesses et des programmes qui restent lettre morte», a-t-il souligné. Le président français Emmanuel Macron a promis que son pays ferait «tout» pour «aider» le Liban, confronté à «une crise profonde».
Le calme est revenu mercredi à Beyrouth et dans d'autres grandes villes même si des contestataires ont continué de bloquer des routes à Tripoli, dans le nord, où des écoles sont restées fermées, a constaté l'AFP.
«Gestion du chaos?»
Dès la formation du gouvernement mardi soir, des manifestants ont incendié des pneus et bloqué des autoroutes à travers le pays. «Au lieu des politiciens corrompus, on a droit aux amis des politiciens corrompus», raillait Ahmad Zaid, un étudiant de 21 ans à Beyrouth.
Dans la capitale, quelques centaines de personnes rassemblées près du parlement ont lancé pétards et pierres sur les forces de l'ordre, qui ont répliqué avec des gaz lacrymogènes et au canon à eau. «Un gouvernement de gestion du chaos?» s'interrogeait mercredi le quotidien «An-Nahar».
En trois mois de contestation, la colère n'a fait que grandir chez les manifestants. Ceux-ci réclament le renouvellement complet d'une classe politique accusée de corruption et d'incompétence, dominée par les mêmes grandes familles depuis des décennies.
Ces derniers mois, la crise économique s'est aggravée avec des licenciements en masse, des restrictions bancaires drastiques et une forte dépréciation de la livre libanaise face au dollar dans les bureaux de change.
Besoin de temps
La nouvelle équipe se retrouve confrontée à une tâche titanesque, dans un pays qui croule sous une dette avoisinant les 90 milliards de dollars (autant en francs), soit plus de 150% de son Produit intérieur brut (PIB). «Concernant la situation économique, je le répète, cela fait partie de nos priorités», estimait mardi soir Hassan Diab. «Il faut nous accorder un peu de temps», a-t-il plaidé.
Dans une économie où le système bancaire occupe un rôle prépondérant, les autorités vont devoir gérer le manque de confiance criant de la population à l'égard des banques, qui ont adopté des restrictions draconiennes sur les retraits en dollars ou les transferts vers l'étranger.
Le gouvernement a été formé par un seul camp politique, celui du Hezbollah chiite pro-iranien et ses alliés, majoritaires au parlement. Les partis soutenant l'ex-premier ministre sunnite Saad Hariri ont refusé d'y participer.
Au côté du Hezbollah, on compte notamment la formation chiite Amal, ainsi que le Courant patriotique libre (CPL), fondé par le président Michel Aoun. Parmi les ministres figurent des noms inconnus du grand public, notamment des académiciens. Le ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil, honni des manifestants, a été remplacé.
Aide française
La France fera «tout» pour «aider» le Liban, pays confronté à une «crise profonde» et au bord de l'effondrement économique, a déclaré mercredi le président français, Emmanuel Macron, lors d'un déplacement à Jérusalem.
«Nous ferons tout, dans une crise profonde qu'ils traversent, pour aider nos amis libanais et libanaises», a affirmé Emmanuel Macron, alors que le nouveau gouvernement libanais tenait mercredi son premier Conseil des ministres, après une nouvelle soirée émaillée de violences.
Emmanuel Macron a aussi souligné qu'il allait rester «vigilant» sur des «activités terroristes» depuis le Liban qui menaceraient non seulement les Libanais, mais Israël, pays voisin en conflit avec le mouvement chiite libanais Hezbollah.
Rencontre avec Netanyahou
Le président français a rencontré mercredi matin à Jérusalem le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, avec lequel il a discuté des tensions régionales, notamment avec l'Iran, ennemi juré d'Israël.
Les Israéliens accusent l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire et de chercher à convertir au Liban, via son allié du Hezbollah, des roquettes en missiles de précision pouvant déjouer le bouclier antimissile israélien «Iron Dome».
«La France restera attachée à ce que l'Iran n'acquière jamais l'arme nucléaire, mais à ce que nous évitions aussi dans la région toute escalade militaire quelle qu'elle soit», a déclaré le président français lors d'un point de presse avec son homologue israélien, Reuven Rivlin. (nxp/afp)