Le sapin en pot, vivant mais pas si écolo que ça

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VaudLe sapin en pot, vivant mais pas si écolo que ça

L'arbre de Noël à louer a fait sa place sur le marché romand. Le fait qu'il soit vivant convainc ses clients. Mais son bilan carbone déçoit.

Pauline Rumpf
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Pauline Rumpf

Il a fait son apparition il y a quelques années, et est déjà la star montante des Noëls un peu bobos: le sapin en pot, réutilisable, et surtout vivant. Cette saison chez Ecosapin, basé à Cottens, plus de 2500 arbres ont fait un aller-retour entre la pépinière et le salon de familles romandes. L'entreprise a essaimé en Suisse alémanique et débarque même en France sous forme de franchise.

«Pour la plupart de nos clients, c'est la bonne odeur de forêt qui convainc, et l'idée de ne pas tuer un arbre, surtout en pleine période de fête», explique François Hofer, associé chez Ecosapin, alors que la période de récolte chez les clients vient de prendre fin. «La livraison à domicile joue aussi bien sûr un rôle», ajoute-t-il.

Non, ce ne sera pas le même l'an prochain!

Sauf que, tout compris, le bilan carbone de l'Ecosapin n'est peut-être pas si bon qu'il y paraît. Notamment parce que les jeunes pousses viennent pour l'instant de Belgique. «Nous avons lancé des cultures de sapin en pot avec des partenaires en Suisse, car il n'en existait pas, assure François Hofer. Mais il leur faut 8 à 12 ans avant d'être assez grands.»

En outre, le fantasme de l'arbre réutilisé chaque année est très présent chez les clients. «Il ira chez une autre famille l'année prochaine, ou peut-être qu'il reviendra chez moi», avons-nous entendu auprès de plusieurs convaincus. Mais là aussi, problème: la nature ne peut être brusquée, et la plante subit un gros choc lorsqu'elle fait un séjour dans une pièce chauffée. Si elle a été assez arrosée et qu'elle survit, ce qui est le cas dans 50% à 80% des cas environ selon la taille et la météo, il lui faudra alors 4 à 5 ans pour reprendre des forces. Trop grande pour repartir en pot, la plante aura alors bien une seconde vie, mais ce sera la dernière, car elle sera vendue à la coupe.

Chaque test prend des années

Consciente du problème, la société Ecosapin travaille avec plusieurs hautes écoles pour améliorer le taux de reprise des sapins, et raccourcir le délai entre ses voyages possibles. «Le problème, c'est que pour chaque test, il faut attendre des années avant d'être fixés sur le résultat...» L'entreprise travaille par ailleurs à limiter son impact dans les autres domaines, comme la réduction de ses déchets, la réutilisation de tout le matériel qu'elle peut éviter de jeter et racheter («alors que ce serait moins cher», relève François Hofer).

Au final, l'Ecosapin est-il vraiment plus écolo qu'un sapin local, coupé puis valorisé en compost ou en biogaz? «A priori pas, estime Sébastien Humbert, expert durabilité chez Quantis. Nous n'avons pas fait le calcul précisément, mais quand on sait que c'est le transport qui représente généralement la plus grosse charge carbone d'un produit, le transport de Belgique risque de tuer le bilan de ce sapin.»

«Toutefois, l'optimisation du déplacement joue un rôle, poursuit le spécialiste. Si chaque client prenait sa voiture pour aller acheter un sapin à Cottens, le bilan serait moins bon que celui d'une tournée de livraison bien organisée.» Quant à la question de la réutilisation de l'arbre, elle est d'abord émotionnelle et philosophique, estime Sébastien Humbert. «En soi, les sapins poussent facilement et ne représentent pas une utilisation excessive du sol. En couper chaque année n'est donc pas une catastrophe écologique.»

Plus d'un million de sapins

Selon Forêt Suisse, entre 1,2 et 1,4 millions de sapins de Noëls sont vendus en Suisse chaque année. Un peu plus de la moitié vient du Danemark, d'Allemagne ou des Pays-Bas, tandis que 40 à 45% proviennent des quelque 500 exploitations indigènes qui en produisent.

Artificiel vs naturel

Selon une étude canadienne, il peut être plus écologique de décorer un sapin artificiel que de couper un arbre vivant chaque année. Mais cette règle ne devient vraie que si on conserve le même arbre en plastique au moins 20 ans.

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