BirmanieL’ONU exprime sa «profonde préoccupation»
Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est exprimé en termes choisis, jeudi, pour évoquer le coup d’État survenu en Birmanie.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté jeudi une déclaration sur la Birmanie, exprimant sa «profonde préoccupation» face à l’état d’urgence instauré et demandant «la libération de tous les détenus», a-t-on indiqué de sources diplomatiques.
Ce texte, rédigé par le Royaume-Uni, ne condamne plus le coup d’État militaire comme envisagé dans un premier texte lors d’une réunion d’urgence mardi. La Chine et la Russie se sont opposées à cette formulation, selon des diplomates s’exprimant sous couvert d’anonymat. La déclaration appuie aussi le retour au dialogue et à un processus démocratique en Birmanie.
«Il vaut mieux un texte moins-disant que pas de texte du tout», a indiqué un diplomate, en rappelant que les négociations étaient difficiles depuis mardi avec la Chine, premier soutien de la Birmanie. Pour Pékin, la situation aujourd’hui dans ce pays relève d’une «affaire intérieure», rappelle cette source.
Réaction de la Chine
Dans un communiqué, la mission diplomatique chinoise auprès de l’ONU a assuré ne pas avoir bloqué le texte du Conseil de sécurité, dont toute action «doit favoriser la stabilité politique et sociale de la Birmanie ainsi que sa paix et sa réconciliation». «C’est dans cet esprit que la Chine a participé aux discussions de manière constructive, contribuant à l’amélioration du texte et à la recherche d’un consensus», a précisé un porte-parole chinois.
Au lendemain d’une déclaration virulente du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, assurant qu’il ferait tout pour que la pression permette «de s’assurer que (le) coup d’État échoue», la mission chinoise a souligné dans son communiqué que «la communauté internationale devrait créer un environnement extérieur sain pour que la Birmanie puisse résoudre correctement les différends». «Et nous faisons notre part à cet égard», a assuré le porte-parole chinois.
La dernière déclaration du Conseil de sécurité de l’ONU sur la Birmanie remontait à 2018 après une visite dans la région auprès de réfugiés Rohingyas, victimes, selon l’ONU, d’un «génocide» à partir de 2017 commis par l’armée birmane. Tout au long de cette crise, la Chine avait multiplié les obstructions à la tenue de réunions ou l’adoption de déclarations par le Conseil de sécurité, jugeant que ce dossier relevait des seules affaires intérieures de la Birmanie.
«Sanctions ciblées»
Le président américain Joe Biden a exhorté jeudi les généraux birmans, qui ont renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi, à «renoncer au pouvoir» sans conditions. «L’armée birmane doit renoncer au pouvoir dont elle s’est emparée, libérer les défenseurs et militants qu’elle a arrêtés, lever les restrictions sur les communications et s’abstenir de toute violence», a-t-il ajouté, quelques heures après que la Maison-Blanche a annoncé envisager des «sanctions ciblées» contre les militaires auteurs du coup d’État.
«Nous étudions des sanctions ciblées à la fois contre des individus et contre des entités contrôlées par l’armée», a déclaré, lors d’un point de presse, Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden. «Ceci ne peut être mis en doute: dans une démocratie, la force ne peut être utilisée contre la volonté du peuple», a conclu le président américain.
Appel à bloquer Facebook
Les généraux birmans ont ordonné jeudi aux fournisseurs internet de bloquer l’accès à Facebook, outil essentiel de communication en Birmanie, trois jours après leur coup d’État contre le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi, tandis que les appels à résister au putsch se propageaient.
L’armée a mis brutalement fin lundi à la fragile transition démocratique du pays, instaurant l’état d’urgence pour un an et arrêtant Aung San Suu Kyi ainsi que d’autres responsables de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).
L’ex-dirigeante de 75 ans, mise depuis au secret, a été inculpée pour avoir enfreint une obscure règle commerciale. Jeudi, plusieurs centaines de partisans de l’armée se sont réunis à Naypyidaw, la capitale. «On ne veut plus des traîtres nationaux vendus à des pays étrangers», «Tatmadaw (les forces armées) aime les gens», pouvait-on lire sur des pancartes.