GenèveNouvelle attaque contre les nuisances de l’aéroport
Communes et associations recourent contre le développement de Cointrin, adoubé par Berne. Le secteur immobilier se joint aux critiques contre les nuisances du trafic aérien.

Communes, riverains et associations dénoncent depuis des années les nuisances du trafic aérien, près de Cointrin.
TDG«L’exploitation débridée de l’aéroport relègue au second plan la santé des riverains et la protection du climat; c’est une fuite en avant!» La colère de la conseillère nationale Lisa Mazzone (Les Verts/GE), à la tête de la Coordination régionale pour une infrastructure aéroportuaire plus respectueuse de l'environnement (CARPE), fait écho à celle d’autres associations écologistes. Mais aussi de 24 communes (15 genevoises, 2 vaudoises, 7 françaises) et de plusieurs collectifs d’habitants. Ensemble, ils ont déposé il y a une semaine un recours au Tribunal administratif fédéral contre la décision de la Confédération, fin 2022, d’adouber le nouveau plan d’exploitation de Cointrin.
Santé, bien-être et climat en jeu
Le bruit et la pollution générés par l’aéroport sont sous le feu des critiques depuis des années. En 2019, les Genevois ont par ailleurs accepté l'initiative 163 qui veut contenir le développement de l’infrastructure. «Et pourtant, Cointrin planifie une hausse de 17,5% des vols par heure à l’horizon 2030, ce qui va notamment intensifier les nuisances avant 7h et après 22h, ont dénoncé les recourants. Le nombre de passagers devrait passer de 14 millions aujourd’hui à 25 millions à la fin de la décennie.»
La santé et le bien-être de la population sont en jeu, a martelé Mathias Buschbeck, conseiller administratif Vert de Vernier: «Au lieu de protéger les gens, les autorités privilégient le secteur aérien et ne jouent pas leur rôle de régulateur. Cela doit cesser!» Membre de l’association Avocat.e.s pour le climat, Me Léna Nussbaumer-Laghzaoui a de son côté fustigé un plan de développement qui «ne respecte pas les engagements et les obligations climatiques de la Suisse».
Pas bon pour les affaires immobilières
Il n’y a pas que les riverains et les milieux pro-climat qui s’effraient du rugissement des réacteurs et de la pollution du kérosène. Outre des municipalités à droite, parmi les opposants figure aussi la Chambre genevoise immobilière (CGI). Si elle juge l’aéroport nécessaire à la prospérité de la région, elle regrette que Cointrin ne tienne pas suffisamment compte d’autres intérêts. Notamment ceux de milliers de propriétaires de logements. «Davantage de nuisances dévalueront la valeur des biens immobiliers, de quoi causer des dommages économiques gigantesques, a assuré Christophe Aumeunier, secrétaire général de la CGI. Par ailleurs, cela rendra inconstructible une part importante du territoire, ce qui portera atteinte à la lutte contre la pénurie de logements.»
Des chances de succès
Selon l’avocat des opposants, le plan sectoriel échoue à proposer «une pesée d’intérêts judicieuse» entre l’exploitation de l’aéroport et son impact sur la santé ainsi que sur l’environnement. Me Jean-Daniel Borgeaud a cependant bon espoir que le recours trouve grâce aux yeux des juges fédéraux: «Il existe une jurisprudence en la matière. Des riverains de l’aéroport de Zurich ont mené trois actions de ce type, dont la dernière en 2021, et elles ont abouti.»
En parallèle de l’action juridique intentée par les communes, les associations et les particuliers, une pétition a été lancée. Adressée au Conseil fédéral et au Conseil d’Etat genevois, elle demande une révision du nouveau règlement d’exploitation de Genève Aéroport.
Un futur aéroport moins bruyant, selon Cointrin et l’Etat
Le Département genevois des infrastructures, qui chapeaute l’aéroport, n’a pas souhaité commenter un recours dont il n’a «pas encore pris connaissance du contenu». Il estime cependant que le futur développement de Cointrin sera positif pour l’agglomération. Selon lui, la nouvelle réglementation fixe notamment «un cadre contraignant pour le bruit émis, avec un objectif de réduction des nuisances à l'horizon 2030». Un rappel que fait également Genève Aéroport: «Nous avons pris acte du recours. Nous apporterons tous les éléments nécessaires, pour éclairer le dossier qui avait obtenu toutes les validations fédérales.»