VaudPetits patrons de la construction devant la justice
Plusieurs chefs d’entreprise, des collaborateurs du syndicat Unia – licenciés depuis lors – ainsi que de nombreux employés fictifs ou réels ont participé à une vaste fraude à la Caisse cantonale vaudoise de chômage.

L’enquête sur la vaste fraude au détriment de la Caisse cantonale vaudoise de chômage (CCh) débouche sur des audiences au tribunal.
Keystone/archiveOuverte en 2016, l’enquête sur la vaste fraude au détriment de la Caisse cantonale vaudoise de chômage (CCh) débouche sur des audiences au tribunal. Cette étape permet d’en apprendre un peu plus sur le stratagème utilisé pour tromper les autorités chargées d’accorder les indemnités en cas d’insolvabilité (ICI).
Globalement, le procureur en charge de l’enquête soupçonne qu’environ 3 millions de francs ont été indûment versés à des travailleurs consécutivement à la faillite des sociétés censées les employer. La fraude a nécessité la participation de chefs d’entreprise, de collaborateurs du syndicat Unia – licenciés depuis lors – ainsi que de nombreux employés fictifs ou réels.
Deux chefs d’entreprise kosovars actifs dans la construction sont renvoyés à la fin du mois devant le Tribunal d’arrondissement du Nord vaudois pour escroquerie. Ils ont pour l’essentiel admis les faits, ce qui permet de les juger selon une procédure simplifiée. Le Ministère public requiert à leur encontre des peines entre 12 et 18 mois de prison avec sursis, et admet des prétentions civiles de 35’000 et 108’500 francs à verser à la plaignante, la CCh.
Un rôle pivot
Les deux actes d’accusation lèvent un coin du voile sur ces opérations frauduleuses. Ils montrent que les protagonistes principaux se connaissaient et qu’un ancien collaborateur d’Unia – qui sera déféré séparément en justice – aurait joué un rôle pivot, même s’il faut rappeler qu’à ce stade, la présomption d’innocence prévaut.
Cet homme, qui maîtrisait bien la procédure d’octroi d’ICI, «aurait prodigué des conseils et donné des instructions précises» aux petits patrons «afin que le montage frauduleux – qui nécessitait principalement la création de dossiers fallacieux – aboutisse favorablement à leur profit et au détriment de la CCh», écrit le procureur qui n’a pas pu être joint mercredi.
Ribambelle de faux
Selon les cas, il était conseillé aux petits entrepreneurs, respectivement à leurs employés, de majorer abusivement leurs heures de travail. Les fraudeurs demandaient parfois à des personnes réelles de faussement déclarer avoir travaillé pour l’entreprise (employés fictifs). Avec à la clé de fausses attestations de salaire, de faux décomptes horaires ainsi que des productions de créances injustifiées auprès des offices de faillite.
Dans l’une des deux affaires – qui implique une entreprise de ferraillage – dix employés ont touché des indemnités allant de 18’000 à presque 25’000 francs. La plupart d’entre eux seront également poursuivis séparément. Dans les faits, cet argent est allé au chef d’entreprise qui a rétrocédé 3500 à 6000 francs à chaque participant pour les récompenser, soutient le Parquet.
Ce petit patron d’une entreprise de ferraillage aurait ensuite versé un quart du montant global au «syndicaliste» – soit 51’000 francs pour cette seule arnaque. Il a conservé le solde, à savoir 108’500 francs, détaille l’acte d’accusation.
Cette affaire de fraude à la caisse cantonale de chômage a éclaté au grand jour en 2017. A l’époque, quatorze personnes – dont les deux chefs d’entreprises qui seront jugés le 30 septembre à Yverdon – avaient été placées en détention provisoire. Des interpellations avaient été effectuées dans les cantons de Vaud, Fribourg et Berne. La Caisse de chômage avait porté plainte.