SuissePremier succès pour les personnes non binaires
Un tribunal argovien a récemment reconnu légalement l’existence du genre non binaire. Une première en Suisse. L’organisation «Transgender Network Switzerland» appelle désormais la Confédération à agir.

«C’est juste incroyable! Surtout le fait que la Suisse soit déjà si loin», se réjouit la mannequin suisse Tamy Glauser. La personne qui se définit comme non binaire (ndlr: appartenir ni au genre féminin ni au genre masculin) fait allusion a une récente décision du Tribunal cantonal argovien. Les juges ont en effet estimé qu’une inscription de genre biffée d’un registre officiel à l’étranger doit être reconnue par les autorités suisses. D’un point de vue légal, il s’agit de la première reconnaissance du genre non binaire en Suisse. Pour Marianne Aeberhard, cheffe de projet pour l’association humanrights.ch, il est désormais grand temps d’agir: «Il faut maintenant faire le nécessaire pour que les personnes non binaires puissent se faire enregistrer correctement en Suisse.»
Concrètement, la justice argovienne a dû se pencher sur le cas suivant: le Suisse Julian P. (nom d’emprunt) vit en Allemagne pour des raisons professionnelles. Il a fait biffer son prénom ainsi que l’inscription de son genre à l’office de l’état civil allemand. En juin dernier, il a déposé une demande dans sa commune d’origine située dans le canton d’Argovie, afin qu’elle reprenne les changements effectués en Allemagne et les inscrive dans le registre suisse. Or, le département en charge de l’affaire avait refusé de le faire. Raison pour laquelle Julian P. s’est battu en justice avec l’aide de l’association «Transgender Network Switzerland» (TGNS).
«Le modèle de genre binaire est dépassé»
En première instance, la justice argovienne avait estimé que l’absence de genre dans le registre allemand ne collait pas avec les valeurs régnant actuellement en Suisse. L’avocat de Julian P. avait par la suite fait recours auprès du Tribunal cantonal, estimant «qu’une décision prise à l’étranger doit aller à l’encontre des piliers centraux du système juridique helvétique pour ne pas être acceptée en Suisse». Ce qui n’est pas le cas ici, a-t-il argumenté. Selon lui, l’identité non binaire est d’ores et déjà une réalité en Suisse. Pour finir, les juges du Tribunal cantonal lui ont donné raison sur toute la ligne.
«Avec cette décision, le tribunal démontre indéniablement que le modèle de genre binaire est dépassé», estime Alecs Recher, en charge du conseil juridique au sein de TGNS. Il rappelle cependant que la décision concerne uniquement une inscription de genre biffée à l’étranger. Raison pour laquelle il exige du Conseil fédéral de prendre les mesures nécessaires afin que les personnes non binaires puissent s’enregistrer correctement en Suisse.
Le jugement du tribunal argovien n’est pas encore entré en force.