Santé et beautéLe phénomène des «Sephora Kids» inquiète aussi la Suisse
Des préadolescentes qui se ruent sur les crèmes anti-rides, c'est aussi inutile que coûteux. Pharmaciens et politiciens cherchent des solutions face à cette mode.

De plus en plus de jeunes filles utilisent des crèmes anti-rides (image d'illustration).
Getty ImagesPour beaucoup, il s'agit juste d'imiter leurs idoles des réseaux sociaux. Mais le phénomène des Sephora Kids, des préadolescentes qui claquent des fortunes pour s'offrir des crèmes anti-âge, ne cesse de prendre de l'ampleur. À tel point qu'une grande chaîne suédoise de pharmacies a annoncé la semaine dernière qu'elle allait introduire une limite d'âge minimal de 15 ans, pour se procurer certains produits.
En Suisse aussi, voir des gamines de 10 ans ou à peine plus acheter des cosmétiques, qui ne leur sont pas destinés et qui ne leur servent à rien, inquiète les spécialistes. «Cela n'a pas de sens pour des personnes aussi jeunes. Leur peau possède tout ce dont elle a besoin. De plus, la plupart des crèmes promettent davantage que ce qu'elles font réellement. Les concentrations des ingrédients sont si faibles, pour que le produit ne soit pas considéré un médicament, qu'elles ne peuvent pas avoir l'effet escompté», estime la dermatologue Daniela Kleeman, interrogée par nos collègues alémaniques.
Élues pas favorables à une interdiction
Pour cette dernière, les seuls produits de soins de la peau recommandés pour les enfants, ce sont les crèmes solaires. Et, en cas de problème particulier, par exemple de l'acné, un traitement spécifique peut-être prescrit, idéalement après consultation avec un dermatologue. Même son de cloche, du côté d'une grande pharmacie zurichoise: «Nous constatons une augmentation du nombre de jeunes qui souhaitent des conseils sur ces produits très en vogue, explique Sarah Gander, assistante en pharmacie. Mais nous avons parfois dû leur dire que nous préférions ne pas leur vendre ces produits, car ils ne leur servaient à rien.»
Dans la sphère politique, la conseillère nationale Vroni Thalmann-Bieri (UDC, LU) se dit «choquée» par les Sephora Kids, mais elle estime que Berne n'a pas à intervenir. «Tant qu'il n'y a pas de risque pour la santé, on ne doit pas tout interdire tout de suite», dit-elle. Sa collègue bâloise Sarah Wyss (PS) ne veut pas non plus d'une interdiction, mais elle prêche pour une meilleure information. Idem pour la Zougoise Manuela Weichelt (Les Verts): «J'attends des professionnels qu'ils informent bien lorsqu'une jeune personne achète une crème anti-rides et qu'ils signalent les effets secondaires.»
«J'irai en acheter en Allemagne»
Trois ados zurichoises ont aussi été interrogées par nos confrères alémaniques. Toutes les trois ont déjà utilisé des produits anti-âge. La première ne jure plus que par ça et ne voudrait plus s'en passer. La deuxième indique qu'avec ses amies «parfois, nous allons aux toilettes et nous échangeons des crèmes entre nous. En cas d'interdiction, j'irais probablement en acheter en Allemagne.» Enfin, la troisième ne voit aucun intérêt à ces crèmes. Le petit pot qu'elle s'était acheté traîne désormais dans un coin de la salle de bain.