Satellite Starlink en feu«On n'a aucune garantie que tout brûle avant d'arriver au sol»
L'impressionnante traînée incandescente dans le ciel suisse, mardi soir, soulève de nombreuses questions. A l'EPFL, on dénonce une ère du satellite dispensable.
Une gigantesque «étoile filante» a captivé la Suisse mardi soir. Il s'agissait d'un satellite en fin de vie, entrant dans l'atmosphère pour s'y consumer.
20min/lecteur-reporterCe n'est pas parce qu'il ne s'agissait ni de l'apocalypse ni des aliens que tout le monde est pleinement rassuré au lendemain de la combustion spectaculaire d'un débris spatial dans le ciel suisse mardi soir. L'objet volant, pas tout de suite identifié, était en effet un des plus de 5000 satellites de Starlink, société détenue par Elon Musk, qui se désintégrait en entrant dans l'atmosphère. De quoi craindre la retombée de débris sur des zones habitées.

Une scène impressionnante mais «qui s'annonce désormais courante» et soulève de nombreuses questions, selon la directrice exécutive de l'EPFL Space Center, Emmanuelle David. Parmi elles, celle de la sécurité, sur laquelle la chercheuse ne se montre pas rassurante. Si ces «réentrées» sont planifiées et que les gros satellites sont dirigés pour s'abîmer dans l'océan, les petits, eux, sont moins prévisibles: on en connaît généralement l'heure, mais pas exactement le lieu. Et ce n'est pas tout.
Un trou dans un toit en Floride
«Non, on n'a aucune garantie que tout brûle avant d'arriver au sol, affirme-t-elle. Starlink se fonde sur des études et son expérience pour dire qu'il n'y a pas de risque, mais des éléments très solides comme les batteries ou les réservoirs peuvent résister à la combustion.» Un tel cas s'est récemment produit en Floride, où un objet de 700 g venu de l'espace a traversé le toit d'une maison. Une étude française montrait récemment qu'une collision avec un avion n'était pas impossible, et potentiellement très grave.
À l'EPFL, des recherches sont en cours pour améliorer la désintégration de ces satellites, mais d'éventuels changements prendront encore des années et dépendent des lois des différents États, décrit Emmanuelle David. En attendant, on peut toujours surveiller quels débris spatiaux se trouvent au-dessus de notre tête, même si ça ne changera pas grand-chose si l'un d'eux entre dans l'atmosphère au-dessus de nous.
«Ces combustions ont un impact encore inconnu»
Avec la forte hausse du nombre de satellites en l'air, la question de la combustion se pose de plus en plus, complète la spécialiste. En outre, «on est entrés dans l'ère du satellite jetable», avec une durée de vie chez Starlink d'environ quatre ou cinq ans au lieu d'une quinzaine d'années. Or aucune étude sur les impacts de leur combustion dans les hautes couches de l'atmosphère n'existe à ce jour, déplore-t-elle.
«Pourtant, l'accumulation de particules, par exemple d'aluminium, pourrait avoir un impact notamment sur le réchauffement climatique. Les scientifiques alertent, et il va falloir prendre des mesures rapidement.» Sa solution: «Le spatial doit entrer dans l'ère de l'économie circulaire. Il faut allonger la durée de vie de ces objets, les rendre réparables. Mais je suis confiante: on voit que les étudiants, ici, ont intégré ces questions et comptent les appliquer à l'avenir.»