L'orgasme ne doit pas être à sens unique

Dania Schiftan est psychothérapeute et sexologue à Zurich. Elle est l'auteure de plusieurs ouvrages, dont «Le plaisir, ça s'apprend».

Dans un récent entretien accordé à «20 minutes», vous avez déclaré que la technique était plus importante que la taille du pénis pour éprouver du plaisir sexuel. Quelle est, au juste, la bonne technique?

Un grand nombre d'hommes ont pour habitude de se masturber en effectuant des mouvements rapides de va-et-vient. Lors d'un rapport sexuel, ils utilisent le vagin de la même façon pour faire des va-et-vient rapides. Or, chez la femme, c'est surtout la partie arrière du vagin qui est sensible à la pression. Cela signifie qu'elle va éprouver plus de plaisir lorsque le pénis effectue un massage des parois vaginales, notamment par des mouvements de balancier. Ou lors de l'introduction des doigts à l'intérieur du vagin.

Comment s'acquiert cette technique?

C'est surtout une question de pratique. La plupart des femmes découvrent d'abord leur organe génital externe, c'est-à-dire la vulve et la tête du clitoris. C'est à ce niveau, et rarement à l'intérieur du vagin, qu'elles vont rechercher du plaisir. Lors d'un rapport sexuel avec un homme, ce plaisir est censé provenir de la pénétration. Sauf que la femme n'est pas du tout habituée à être excitée de la sorte.

C'est-à-dire?

Toutes les femmes peuvent éprouver du plaisir lors de rapports vaginaux, mais si on ne l'éveille pas, si on ne le développe pas, on ne ressent rien ou presque. Il ne peut y avoir excitation que si le vagin est régulièrement stimulé. Ce n'est qu'ainsi que se forment les synapses qui permettent de ressentir du plaisir.

La masturbation peut-elle aider les femmes à atteindre l'orgasme lors d'un rapport sexuel avec leur partenaire?

Absolument. Mieux elles connaissent leur corps, plus elles augmentent leur excitabilité. Ainsi, elles sont en mesure de communiquer concrètement sur cet aspect avec leur partenaire. Par conséquent, le rapport sera satisfaisant. L'idée selon laquelle le partenaire sait automatiquement ce que je veux est une ineptie totale. Il n'est pas à l'intérieur de mon corps!

La communication est donc cruciale pour une sexualité épanouie.

Et comment! La plupart d'entre nous n'ont pas l'habitude d'en parler. La sexualité est encore associée à la honte dans l'esprit de beaucoup. Il leur manque les mots pour en parler. Mais on peut les apprendre. D'une part, pour désigner des parties du corps comme le «pénis» et la «vulve», d'autre part pour exprimer des désirs et des envies.

Et si c'est trop difficile?

Dans ce cas, on peut aussi montrer les choses en se servant clairement et sans équivoque des mains, de la bouche, du pénis, de la vulve de l'autre et en les amenant là où l'on le souhaite. Toujours en accord avec l'autre, bien sûr.

Peut-on avoir une sexualité épanouie sans orgasme?

Oui et non. Beaucoup de femmes, environ un tiers, n'ont pas d'orgasme pendant les rapports sexuels et pensent que c'est tout à fait normal parce qu'elles sont nombreuses dans ce cas. Par conséquent, elles n'essaient pas de changer quoi que ce soit. Elles s'en accommodent. Dans une relation hétérosexuelle de longue date, si l'homme est seul à jouir, au bout d'un moment, cela n'a plus de sens pour la femme d'avoir des relations sexuelles. Après tout, nous sommes des êtres pragmatiques: si je n'en profite pas, je finis par ne plus en avoir envie.

Comment éviter que le sexe ne devienne trop cérébral parce que l'on veut tout faire correctement?

Quand on pratique le sexe ensemble ou que l'on veut découvrir et essayer quelque chose de nouveau, la situation peut être un peu tendue pendant un certain temps. Mais ça n'est pas grave. C'est comme pour la danse: là non plus, ça ne coule pas de source dès le départ.