La naturalisation suisse devient l'apanage des universitaires

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SuisseLa naturalisation devient l'apanage des universitaires

La Commission fédérale des migrations déplore que les personnes peu qualifiées se voient de plus en plus exclues de la procédure pour obtenir la nationalité suisse.

Environ deux tiers des étrangers naturalisés sont hautement qualifiés.

Environ deux tiers des étrangers naturalisés sont hautement qualifiés.

20min/Marvin Ancian

Pour les étrangers souhaitant un passeport à croix blanche, mieux vaut être bardé de diplômes. Ce changement de paradigme étant la conséquence directe de l'entrée en vigueur en 2018 de la nouvelle loi sur la nationalité. «Alors que la part des étrangers hautement qualifiés représentait un tiers des naturalisés sous l'ancien droit, près des deux tiers disposent désormais d'un diplôme universitaire. En revanche, la proportion des personnes n’ayant pas poursuivi leur formation au-delà de l'école obligatoire est passée de 23,8% à 8,5%», décrit Pascale Steiner, de la Commission fédérale des migrations (CFM).

Ces données sont extraites d'une étude réalisée par des chercheurs des universités de Genève, de Neuchâtel et de Bâle, publiée ce jeudi. Selon cette enquête, les raisons de cette nouvelle sélectivité sont diverses. Parmi elles, la CFM relève que: «Pour les personnes peu qualifiées et moins aisées, il est plus difficile d'acquérir les connaissances linguistiques écrites et orales nécessaires. En outre, pour elles, le risque de devoir recourir à l'aide sociale est plus élevé.»

Les communes choisissent les candidats

Un autre problème identifié réside dans la trop grande marge de manœuvre laissées aux autorités locales. Par exemple, cinq cantons (tous alémaniques) ont fixé des niveaux de langue plus élevés que ceux exigés par la loi fédérale (B1 pour l'oral et A2 pour l'écrit). Ce sont les communes qui évaluent si les candidats sont suffisamment intégrés. «Cela peut conduire à privilégier les personnes hautement qualifiées et aisées», déplorent les chercheurs.

Vu les résultats de l'étude, la CFM demande à présent l'ouverture d'un large débat sur ce qu'elle estime être une dérive. En outre, la solution proposée serait d'abolir la procédure de naturalisation à trois niveaux (Commune, Canton et Confédération) pour ne garder que le dernier, afin de rendre le système plus simple, uniforme et transparent. De plus, la CFM préconise d'instaurer un droit à la naturalisation pour les personnes nées et ayant grandi en Suisse.

Politiciens divisés

Le conseiller national Christian Wasserfallen (PLR/BE) voit cette évolution comme fondamentalement positive. «Une bonne intégration dans la société doit toujours être une condition préalable à la naturalisation», dit-il. En revanche, sa collègue Céline Widmer (PS/ZH) ne partage pas cet avis. «La naturalisation d'une personne ne devrait pas dépendre de son niveau de formation, estime-t-elle. Les personnes naturalisées s'intègrent en effet mieux et ont plus de facilité sur le marché du travail.»

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