Beauté masculine: la dangereuse tendance du «marteau» sur TikTok

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Sur les réseauxIls se refont le visage à coups de marteau

C'est la dernière tendance viriliste sur TikTok: se refaire le portrait de manière dangereuse pour atteindre une forme fantasmée de beauté masculine.

La «skin routine» à coups de marteau, dernière tendance douteuse sur les réseaux.

La «skin routine» à coups de marteau, dernière tendance douteuse sur les réseaux.

AFP

Marteau en main, un jeune homme frappe sur sa pommette, dans le but de redessiner son visage: sur le réseau TikTok, certains influenceurs vantent des pratiques non éprouvées et dangereuses comme des manières d’accentuer une supposée forme de beauté masculine. Le «looksmaxxing» s’inscrit dans la «manosphère» en ligne, ces discours masculinistes – hostiles et parfois violents envers les femmes – qui se développent sur les réseaux depuis plusieurs années, à destination de jeunes hommes auxquels le stéréotype du mâle alpha est présenté comme un idéal.

De TikTok à Instagram en passant par YouTube, ces influenceurs proposent de se faire des lèvres plus charnues, un menton – voire des jambes – plus long ou un regard plus sensuel, souvent en monétisant leurs conseils grâce à de la pub. Parfois, ils encouragent aussi à la prise de stéroïdes et à la chirurgie esthétique. Dans la vidéo, l’homme qui se tape la pommette avec la face plate d’un marteau assure qu’il s’agit de sa «skincare routine», ces pratiques de soins quotidiens pour la peau qui inondent les réseaux.

«Looksmaxxing»

Des dizaines de commentaires sous la vidéo relèvent que cette technique est dangereuse, mais d’autres assurent qu’elle permet vraiment d’obtenir une mâchoire plus carrée.

Dans la même veine de «looksmaxxing», le TikTokeur, Dillon Latham, explique à ses 1,7 million d’abonnés qu’ils peuvent blanchir leurs dents en appliquant de l’eau oxygénée avec un coton-tige. Des dentistes assurent qu’utiliser régulièrement ce produit peut endommager l’émail des dents et les gencives.

L'eau oxygénée finit par être dangereuse pour l'émail des dents et les gencives.

L'eau oxygénée finit par être dangereuse pour l'émail des dents et les gencives.

AFP

«Mélange toxique»

Cette tendance est alimentée par «des influenceurs qui promeuvent des corps et des visages parfaits», souvent pour en tirer profit, remarque Siddharth Venkataramakrishnan, de l’Institute for Strategic Dialogue. «Ça se mélange avec la misogynie de la manosphère, créant un mélange toxique». «Plus globalement, cela démontre que les standards de beauté malsains touchent aussi les hommes», dit cet expert.

La tendance puise aussi ses racines dans l’idéologie «incel», une abréviation anglophone pour «célibataires involontaires», désignant des hommes qui ont peu de succès auprès des femmes et se mettent à nourrir une haine à leur égard ou envers le féminisme, jugé responsable de leurs échecs. «Le "looksmaxxing", c’est en fait une version relookée de l’idéologie "incel" sur TikTok», assure Anda Solea, de la School of Criminology and Criminal Justice à Portsmouth (Royaume-Uni).

Interdictions contournées

Dans ses travaux, elle a trouvé que des comptes TikTok liés à la mouvance «incel» pouvaient contourner les interdictions sur les propos haineux en adoptant des termes plus acceptables du «looksmaxxing», sur l’amélioration de soi-même. «Nous cherchons à protéger les femmes des violences liées au genre, mais nous devrions également faire attention aux jeunes hommes», dit-elle à l’AFP.

Parallèlement se développent aussi le «gymmaxxing», qui encourage la prise de muscle, et le «moneymaxxing», qui se concentre sur l’amélioration de son statut financier, dans le but d’accroître sa désirabilité sexuelle. Les algorithmes qui permettent à ces influenceurs de toucher des millions de personnes peuvent déboucher sur des problèmes concrets dans le monde réel. Des chercheurs de la Dublin City University, qui ont créé l’an dernier des faux comptes d’adolescents sur les réseaux sociaux, ont ainsi fait le constat qu’ils avaient ensuite été ciblés par des contenus masculinistes sur TikTok et YouTube.

AFP
(afp/jw)

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