La crue du Rhône a battu un record vieux de 76 ans

1200: c’est la quantité d’eau, en mètres cubes par seconde, mesurée dans le Rhône à Aigle (VD), dimanche vers midi. Cela représente 30 camions de 40 tonnes chargés d’eau qui passent par seconde, a imagé Denis Froidevaux, chef de l’état-major de conduite vaudois, au «12h30» de la RTS.

Une «situation de crue extrême», explique Raphaël Mayoraz, chef du Service valaisan des dangers naturels, à «24 heures». Le fleuve a en effet atteint 924 mètres cubes par seconde à Brigue durant la nuit de samedi à dimanche, dépassant ainsi un record qui datait de 1948.

«Les personnes habitant ou travaillant dans la zone industrielle d'Aigle peuvent y accéder à nouveau librement». Tel est le message délivré dimanche soir par la police cantonale vaudoise.

Le Rhône ayant amorcé sa décrue, la situation s’est améliorée et les risques de débordement du fleuve et de rupture de digues ont fortement diminué. Les restrictions annoncées en milieu de journée peuvent donc être levées. Seul un petit secteur entre Collombey et Saint-Triphon (Pont St-Triphon – Grande Eau) reste interdit.

Avec la fermeture du col, dont la route est obstruée par plusieurs coulées de boue, les personnes souhaitant regagner la Suisse ont été nombreuses à opter pour la solution du ferroutage via le tunnel du Simplon. Ce qui a créé un important bouchon à Iselle, où se trouve la gare de chargement côté italien, selon un lecteur.

Les autorités cantonales tessinoises ont également tenu une conférence de presse, dimanche en fin de journée, en présence d'Ignazio Cassis. Le conseiller fédéral a commencé par rappeler que le gouvernement avait déjà dû intervenir dimanche dernier en raison de dramatiques intempéries. «C’est une bataille que nous devons mener, il y a eu des morts. Cette répétition de catastrophes naturelles nous montre à quel point nous sommes vulnérables», a-t-il expliqué. Ignazio Cassis a tenu à remercier toutes les personnes qui ont dû intervenir durant ces événements. Il s’est également adressé aux personnes endeuillées.

«Les dernières semaines n'ont pas été faciles. Le Tessin, les Grisons et le Valais ont été secoués par ces conditions extrêmes, a poursuivi Christian Vitta, président du Conseil d'État. Ce sont des événements tragiques, qui pour la deuxième fois touchent nos zones de montagne».

Dans le val Maggia, «nous manquons d’eau potable et d’électricité. Les lignes téléphoniques sont également concernées», a déclaré la maire de Cevio, Wanda Dadò, affirmant que tout était actuellement mis en oeuvre afin d’y remédier. «La situation est actuellement stable», a pour sa part indiqué le commandant de la police cantonale Matteo Cocchi. Qui concède qu’il faudra du temps pour tout réparer.

La police cantonale tessinoise a fait le point de la situation dimanche après-midi. Trois personnes ont perdu lors d'un glissement de terrain dans le val Maggia. Une autre est toujours portée disparue dans le val Lavizzara, non loin de là.

Les intempéries ont en outre engendré l'évacuation de quelque 400 personnes dans tout le canton.

«On est toujours très loin de niveaux normaux, mais on est sereins pour la suite, la décrue est entamé», résume Raphaël Mayoraz, chef du service des dangers naturels. Ces prochains jours, le canton n'attend pas de grosses pluies, et l'isotherme 0 degrés devrait redescendre légèrement, de quoi ralentir la fonte des neiges et donc l'apport d'eau dans les cours d'eau.

La situation catastrophique du week-end soulève des questions concernant la sécurisation du Rhône, au coeur d'un projet valdo-valaisan qui a récemment reçu un coup de frein. Des plans d'alerte crue ont été mis en place pas moins de quatre fois au cours de ces sept derniers mois, un rythme inédit, évoque le Canton, qui signale que c'est bien la preuve d'un dérèglement auquel il va falloir faire face. En outre, les cours d'eau latéraux doivent également faire l'objet d'une attention accrue, puisque ce sont ceux-ci qui ont causé les situations dramatiques de Saas-Grund, Zermatt ou encore la Vallée de Conches.

Alors que le Canton du Valais a demandé dimanche matin l'aide de l'armée, les réponses formelles ne sont pas encore arrivées, indique Marie-Claude Noth-Ecoeur, cheffe de l'Organe cantonal de conduite. «Le canton du Tessin a également été lourdement touché. Des priorités doivent être établies.» Le besoin urgent, côté valaisan, est notamment le pompage et le transport d'eau pour dégager les bords du Rhône, mais aussi de relever les équipes d'intervention à pied d'oeuvre depuis des heures déjà. Un hélicoptère superpuma est toutefois déjà actif.

Le service de la mobilité valaisan a fait le point dimanche sur l'état des routes et du rail dans le canton. L'autoroute entre Sion Est et Ouest devrait être rouverte autour de 15h ou 15h30, tandis que la jonction entre Sion et Sierre ne pourra pas être remise en service avant mardi matin. «Il y a toujours une masse d'eau, un torrent latéral déverse encore environ 80 cm d'eau sur la chaussée», explique le chef du service de la mobilité Vincent Pellissier. Et si les cols de la Furka, du Nufenen et du Grimsel devraient pouvoir rouvrir rapidement, celui du Simplon prendra plus de temps. «On va essayer de le dégager avant le week-end prochain.»

Du côté des CFF, le pont de Riddes a été touché. Le trafic reprendra progressivement au cours de la semaine, indiquent-ils.

Entre les deux derniers week-ends tempétueux, les dégâts se chiffrent entre 15 et 20 millions de fr. sur les routes, avec des événements un peu partout, selon le canton.

Une personne a trouvé la mort dans la coulée de boue qui a dévasté le village de Saas-Grund. Son corps a été retrouvé tôt dans la matinée de dimanche, dans un hôtel, après que sa compagne a signalé sa disparition. Il a vraisemblablement été surpris par la montée soudaine des eaux et des gravats, indiquent la police et le Ministère public. Son identification est en cours. Une autre personne, un Suisse de 52 ans parti en intervention professionnelle, est possiblement portée disparue dans la région de Binn.

Le président du Conseil d'Etat Frédéric Favre rappelle que, si les images du débordement du Rhône sont impressionnantes, elles témoignent d'une situation moins grave que dans certaines vallées latérales. «La situation en Bas Valais est impressionnante, mais à Saas-Grund, elle est dramatique», décrit-il.

En conférence de presse dimanche, le conseiller d’Etat valaisan en charge de la sécurité Frédéric Favre a rappelé que la situation de la semaine dernière n'était pas encore résorbée à l'arrivée de ce nouvel événement: des sols déjà saturés en eau, des cours d'eau déjà grossis, mais aussi des équipes déjà fort sollicitées. «Je veux remercier du plus profond de mon coeur celles et ceux qui sont à pied d'oeuvre depuis plus d'une semaine. Les batteries sont à plat.» Mais de préciser que la situation est maintenant sous contrôle. Marie-Claude Noth-Ecoeur, cheffe de l'Organe cantonal de conduite, évoque désormais une lente décrue.

Pour venir en aide aux services engagés en Valais, les services de l'armée ont été demandés et les pompiers des cantons de Vaud, Genève, Neuchâtel et Fribourg sont en route pour venir prêter main forte.

Une fois encore, Frédéric Favre rappelle la nécessité de ne pas se rendre sur les routes ou à proximité des cours d'eau, où les dangers sont encore élevés, et où les secours doivent pouvoir circuler.

Le débit du Rhône a atteint de records depuis le début des mesures, indique l'Office fédéral de l'environnement, relayé par la RTS.

Au maximum de la crue, un débit de 924 m3/s a été enregistré à Sion, surpassant le précédent maximum datant de 1948, avec 910 m3/s. A Brigue et à Brandson, les records ont aussi été battus.

Alors que la situation est chaotique dans le canton, la police valaisanne indique que les routes sont encombrées de personnes se déplaçant en voiture, empêchant le passage des services techniques. «Avec les bouchons, les pelles mécaniques et les secours ne peuvent pas passer. Nous invitons vraiment tout le monde à rester à l'intérieur, en sécurité», exhorte le porte-parole de la gendarmerie.

Fortement touchée par une coulée de boue cette nuit, la commune de Saas-Grund pourrait compter une victime, selon «Blick». La police ne confirme pas cette information pour l'instant, mais indique qu'une personne est effectivement portée disparue. Le Ministère public fera un point de situation à 14h dans le cadre d'une conférence de presse.

Face à un risque important de débordement du Rhône ou de rupture de digues, les autorités ont ordonné l'évacuation préventive de la zone industrielle d'Aigle, et ont pris la décision d'interdire l’accès à la route industrielle d’Aigle à St-Triphon, au moins jusqu'à dimanche 18h.

Le débit du Rhône atteignant 1200 m3, la situation se détériore et les risques de débordement du Rhône ou de rupture de digues augmentent, communique la Police cantonale vaudoise.

Dans la zone concernée, il est recommandé aux personnes de quitter leur domicile ou leur entreprise, de couper le gaz et l’électricité, de fermer portes et fenêtres. «Les personnes qui habitent dans la zone évacuée doivent prendre avec elles leurs papiers d’identité, médicaments, habits de rechange, téléphone portable», et se rendre dans un lieu dédié à Yvorne. Les personnes domiciliées à proximité de la zone concernée, mais non évacuées, sont priées de rester chez elles.

«Tous les moyens disponibles sont engagés», résume la Police cantonale valaisanne. Pour faire face aux inondations aux abords du Rhône ainsi qu'aux nombreuses conséquences des pluies dans les vallées latérales, comme des laves torrentielles et coulées de boues, tout le monde est sur le pont: on compte pas moins de 700 sapeurs-pompiers issus de 35 corps différents, et 200 astreints à la protection civile, sans compter les services techniques de tout le canton. «Mais nous savons déjà que ça ne va pas suffire. L'armée a été appelée en renfort.»

Et si le pic est passé dans le Haut Valais, c'est maintenant en aval, dans le Bas Valais, que l'attention est portée. «Ce n'est pas fini, nous espérons que les digues vont tenir», poursuit la gendarmerie.

Dans le Haut Valais, les pluies torrentielles ont déplacé des gros volumes de boue et de gravats, notamment dans le village de Saas-Grund. «Je suis sorti avec le chien à minuit et tout allait bien, raconte un lecteur. Mais il a plu abondamment toute la nuit.» Et au petit matin, tout était différent. «La rue principale est pleine de boue et de décombres. Plusieurs voitures ont été poussées depuis la rue contre la façade d'un hôtel. D’autres se dressent au milieu de la rue principale, plantées dans des masses de terre.»

Le débit de la rivière Maggia, au Tessin, a franchi des records de débit, en augmentant extrêmement rapidement. «Elle est passée de 25 mètres cubes par seconde à 2000 à Locarno et Solduno, rapporte Luca Panzera de Météo Suisse dans les colonnes de tio.ch. L'hydromètre à Bignasco a enregistré une augmentation d'environ 600 mètres cubes en trois heures, proche d'un record pour cette station. Mais après 1h du matin, elle a cessé de transmettre ses données. Nous ne savons pas si elle fonctionne toujours, mais la coupure d'électricité a en tout cas interrompu la transmission.»

Aux abords du Rhône, de nombreuses évacuations ont dû avoir lieu cette nuit. «Je m'étais endormie devant la télé, la police est venue toquer vers 23h30 pour nous dire de partir, avec une liste d'affaires à emporter», raconte une habitante. D'autres ont connu un réveil plus tardif, vers 3h du matin. Ils ont été dirigés soit chez des proches, soit à la salle de gym de la localité. «Je viens de pouvoir retourner chez moi chercher des affaires, mais c'est pas évident de passer», ajoute-t-elle.

À Sierre, alors qu'il devait encore battre son plein encore dimanche sur les rives du lac de Géronde, le festival «Weekend au bord de l'eau», dont les infrastructures ont été inondées, a été contraint d'annuler sa dernière soirée.

Le quartier industriel de Sous-Géronde étant totalement inondé, les locaux de la chaîne de télévision Canal9 ont été rendus inutilisables, rapporte la RTS. La diffusion a été interrompue, et seul le site web fonctionne encore. «Nous vous ferons vivre les événements exceptionnels de ce weekend sur notre site internet et nos réseaux sociaux», indique Canal9 en ligne.

L'important site industriel de Constellium a également été touché par une inondation, faisant courir le risque de chômage technique pour plusieurs centaines d'employés, ajoute la RTS.

Les impressionnantes pluies de la nuit ont déversé pas moins de 200 litres d'eau par mètre carré dans le haut de la vallée Maggia, indique la RTS. Selon MétéoSuisse, le lieu le plus touché par les pluies de la nuit est la commune de Binn, en Haut-Valais, qui a reçu quelques 155 mm d'eau. Au Tessin, c'est Airolo qui a été le plus arrosé, avec 129 mm de pluie.

Les CFF rament en Valais, où routes et rail sont sous l'eau. «Comme la ligne de chemin de fer, la route cantonale et l'autoroute sont également inondées. Pour le moment, il n'y a aucune possibilité de voyager entre Sion et Sierre», décrivent-ils sur leur site. «Les voyageurs entre Genève-Aéroport et Brig circulent via Berne», ajoutent-ils.

Pour le trafic régional, des bus de remplacement circulent entre Sion et Martigny, et entre Riddes, Chamoson, St-Pierre des Clages et Ardon. Mais la ligne de chemins de fer restera fermée au moins jusqu'à 18h dimanche.